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Le droit d’interpellation tel qu’il est pratiqué en Europe, dans les pays parlementaires, n’existe pas aux Etats-Unis. Lorsqu’un sénateur ou un député désire obtenir du Gouvernement un renseignement ou une explication sur une question politique, il en fait la proposition à la Chambre, qui la met aux voix. Si elle réunit une majorité suffisante, la demande est transmise au Président des Etats-Unis, qui est prié de communiquer au Parlement lesdites informations, « au cas où elles ne lui paraîtraient pas incompatibles avec l’intérêt public » (if not incompatible with the public interest). Si le Président juge cette communication sans inconvéniens, il adresse au Congrès un message contenant les l’enseignemens souhaités en l’accompagnant généralement d’un rapport du département ministériel spécialement mis en cause. Dans le cas contraire, il s’abstient de répondre ou ne répond qu’en partie aux questions qui lui ont été posées.

Pendant les deux premières années de son administration, il y a de grandes chances pour que le Président reste en communion d’idées avec la majorité parlementaire. La nomination des députés et le renouvellement partiel des sénateurs coïncidant avec sa propre élection, les uns et les autres appartiennent le plus souvent au même parti politique. Mais, dans l’intervalle, l’orientation des esprits a pu se modifier et, pendant ses deux dernières années d’exercice, un président démocrate peut parfaitement se trouver en face d’un Congrès républicain, beaucoup moins disposé naturellement à se plier à ses suggestions. Il arrive aussi assez fréquemment que la majorité sénatoriale représente des opinions différentes de celles qui dominent dans l’autre Chambre et que les votes de la haute assemblée soient neutralisés par ceux des députés ou réciproquement.

Le lecteur français habitué à considérer l’accord harmonique de nos deux Chambres comme un élément nécessaire de leur fonctionnement régulier, et leur entente avec le pouvoir exécutif comme une condition essentielle de la stabilité gouvernementale, sera tenté ; de voir dans cet état de choses une source de