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Pour renaître plus vif, plus vaste et plus vivant
Et vivre de nouveau la Vie universelle,
Dans la fuite de l’eau et la force du vent.


L’IMAGE


Que pour d’autres l’amour rende triste l’aurore
Du regret frissonnant d’avoir hier aimé !
Pour nous, dans l’air palpite et se répand encore
La ténébreuse odeur dont tu l’as parfumé.

N’as-tu pas vu, en nous, se lever de l’étreinte
Un dieu né de notre âme et fait de notre chair,
Et qui, debout au seuil de la maison éteinte,
En la jeune clarté sourit au matin clair ?

Amour, prends aujourd’hui nos formes dans la tienne,
Prête-nous pour marcher dans l’herbe tes pieds nus
Et que, ce soir, tes pas par les nôtres reviennent
Au seuil mystérieux où nous t’aurons connu ;

Et laisse-nous, durant ce jour que tu nous donnes,
Sentir en nous ton feu, ta force et ta beauté
Et mirer dans les eaux qui reflètent l’automne
L’image en un seul corps de notre double été.


ÉPIGRAMME


Pour que ton rire pur, jeune, tendre et léger,
S’épanouisse en fleur sonore,
Il faut qu’avril verdisse aux pousses du verger,
Plus vertes d’aurore en aurore,

Il faut que l’air égal annonce le printemps
Et que la première hirondelle
Rase d’un vol aigu les roseaux de l’étang
Qui mire son retour fidèle !

Mais, quoique l’écho de à ton rire avec toi,
Goutte à goutte et d’une eau lointaine,
N’entens-tu pas gémir et répondre à ta voix
La plainte faible des fontaines ?