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formait autrefois l’ancien port de Dieppe, qu’a passé de tout temps, et bien avant notre ère, l’un des grands courans qui ont porté les hommes du continent vers l’île de la Grande-Bretagne. Londinières et Douvrend, sur la côte normande, ne sont plus aujourd’hui que de bien modestes villages ; mais on y retrouve cependant encore quelques débris de l’époque celtique ; et il est curieux de constater que leurs premiers enfans ont été les ancêtres et les colonisateurs de l’un des ports les plus animés de l’Angleterre et de la monstrueuse capitale qui est devenue la métropole maritime d’un empire plus vaste aujourd’hui que l’empire romain. Quant à la vieille cité de Limes, transformée peut-être par César en camp d’observation au moment de la guerre des Gaules, elle a presque complètement disparu, s’est écroulée en grande partie avec la falaise, et les deux retranchemens qui en restent peuvent seuls donner une idée de leur ancienne importance. La mer continue à battre le pied de la roche que couronnaient les tours de la ville gallo-romaine, et sa disparition complète n’est qu’une question de peu d’années.


VII

La mer qui brise contre la falaise normande est presque toujours mauvaise, et rapproche de ce rempart escarpé de près de 150 kilomètres de développement est à bon droit redouté. Les courans y changent quelquefois de sens à chaque heure de la marée. Les vents du large venant frapper violemment contre la muraille et ceux de terre tombant en rafales furieuses de la crête, leur rencontre donne lieu à des remous formidables ; et il est toujours prudent aux navires de se tenir à une certaine distance au large. Nulle part des ports de refuge ne rendraient de plus grands services. On n’en compte malheureusement que quatre, du cap d’Antifer à l’embouchure de la Somme : Dieppe, Saint-Valery-en-Caux, Fécamp et le Tréport ; le premier seul accessible aux bateaux de fort tonnage ; les trois autres aux navires moyens. Deux autres petits havres, Étretat et Yport, ne sont que des ports de pêche et d’échouage. Tous sont naturellement situés à l’entrée d’une rivière ou d’une de ces longues gorges, appelées valleuses, qui découpent le pays de Caux en parallélogrammes à peu près réguliers.

Étretat est à 3 kilomètres à peine du cap d’Antifer, Il reçoit