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80 mètres entre ses deux jetées, un avant-port, dix bassins à flot présentant ensemble une superficie de plus de 80 hectares, quinze écluses de navigation, six formes de radoub et des docks dont l’outillage ne laisse absolument rien à désirer.

L’entrée du chenal sera très prochainement prolongée en mer par deux grandes jetées d’un kilomètre chacune : l’une, celle du Nord, enracinée à la plage sur la côte de Frascati, l’autre, celle du Sud, en prolongement de la jetée actuelle et devant constituer ainsi une rade d’abri de près de 60 hectares. Tout est donc prévu pour assurer au Havre un avenir indéfini.


IV

Du fond de la baie de Seine à Dunkerque, presque à la frontière de la Belgique, la côte de la Manche et du Pas de Calais présente une magnifique ondulation d’une régularité et d’une harmonie parfaites. Nulle part en Europe, peut-être même dans le monde entier, le dernier travail géologique qui a façonné le relief de nos rivages et déterminé la limite toujours un peu variable et mobile entre la terre et la mer n’a dessiné une ligue d’une plus élégante courbure. Cette courbure est double. Convexe au départ du Havre, la côte commence à courir à peu près du Sud-Ouest au Nord-Est, présentant une saillie très prononcée au cap d’Antifer. Elle s’infléchit ensuite peu à peu et devient concave jusqu’à l’embouchure de la Somme, qui marque exactement le point où renfoncement atteint son maximum. Elle se redresse alors insensiblement et finit par remonter presque directement vers le Nord jusqu’au cap Gris-Nez, dont la falaise à pic fait face à la côte anglaise. Immédiatement après, elle tourne brusquement à l’Est et suit un alignement interminable de dunes grisâtres, d’une implacable monotonie. C’est la barrière, tantôt naturelle, tantôt artificielle, mais toujours soigneusement entretenue, qui protège les basses terres des Flandres et se perd à l’horizon dans les brumes de la mer du Nord.

De la Seine à la Somme, ou, plus exactement, de la colline de Sainte-Adresse, où finit la luxuriante végétation de la banlieue du Havre et qui domine à la fois la rade, la ville, les docks et le bassin de notre grand établissement maritime de l’Océan, jusqu’à l’ancien petit port du bourg d’Ault, assez fréquenté, il y a deux siècles à peine, par tous les pêcheurs de la