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l’habitude. Les effusions religieuses s’y alliaient à des conceptions politiques de l’ordre le plus pratique : au fond, la pensée religieuse dominait tout. Dans son traité intitulé Le Calvinisme, le docteur Kuyper écrit, à la manière d’un Joseph de Maistre protestant : « Deux régimes d’existence s’opposent l’un à l’autre en un mortel combat. Le modernisme veut bâtir le monde de lui-même, en partant de l’homme naturel, et conduire l’homme lui-même d’après la nature. D’autre part, ceux qui s’inclinent avec vénération devant Jésus-Christ et qui le considèrent comme le fils du Dieu vivant, Dieu lui-même, cherchent à sauver l’héritage chrétien. » Ici, le docteur Kuyper nous donne l’épithète qui convient à son parti : c’est le parti chrétien, sans distinction de communions ni de sectes, opposé au parti révolutionnaire. Le parti chrétien se compose indifféremment de catholiques et de protestans. Il a remporté la victoire électorale, et une victoire écrasante : tout fait croire qu’à l’instar de ce qui s’est passé en Belgique, il est au gouvernement pour longtemps.

Non pas que nous comparions absolument la situation de la Hollande à celle de la Belgique, pas plus que nous ne comparons celle de ces deux pays à la nôtre. S’il y a des analogies, il y a aussi des différences. En Belgique, la grande majorité du pays est catholique ; elle est protestante en Hollande. Chez nous, la complexité des questions posées ne permet peut-être pas une solution aussi simple que celle que viennent d’adopter les Hollandais après les Belges. Mais l’exemple de ce qui s’est passé chez les uns et chez les autres n’en est pas moins intéressant et instructif pour nous. Nous laissons à tous les partis, — et à l’avenir, — le soin d’en tirer la leçon, qui en ressort, d’ailleurs, assez clairement.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

F. BRUNETIÈRE.