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saillie de cap de la Hague, et dans laquelle les barques de pêche viennent encore se mettre à l’abri du Raz-Blanchard.


X

A 5 kilomètres environ au sud du cap de la Hague, entre Auderville et Herqueville, sur le plateau en saillie qui forme le petit promontoire du Nez de Jobourg et qui domine la mer d’une hauteur de 80 mètres environ, on a retrouvé les vestiges d’un oppidum et d’un camp romain que les archéologues désignent aussi sous le nom de Coriallo ; et c’est peut-être là qu’il convient le mieux de placer le Grannomum du IVe siècle, mentionné par la Notice des dignités de l’Empire[1].

On peut suivre aussi les traces d’une voie romaine qui partait d’Omonville, situé un peu à l’Est de l’anse de Saint-Martin et se dirigeait vers le Sud, se maintenant à peu près au milieu de la presqu’île du Cotentin, à travers le pays que la chronique de Fontenelles, qui date du VIIIe siècle, appelait le pagus Coriovallensis. L’Itinéraire d’Antonin en donne les principales étapes. C’était la voie militaire, allant de Valognes, Alanna, dont le faubourg d’Alleaume a conservé le vieux nom et où on retrouve quelques ruines informes d’amphithéâtre et de bains, à Coutances, Cosedia, et qui venait aboutir à Rennes, Condate, au centre de l’Armorique. Les archéologues et les géographes modernes, on doit l’avouer, ont été très divisés sur ces divers points ; il nous paraît cependant rationnel d’admettre que le port de Coriallo, s’il a existé, devait logiquement se trouver à l’extrémité de la route stratégique dont nous venons de parler.

Mais ce que l’on peut affirmer en toute certitude, c’est que la presqu’île de la Hague, qui est une sorte de môle naturel s’avançant hardiment au travers de la Manche, a été de très bonne heure connue, occupée, et même fortifiée par les premiers navigateurs de ces parages. D’un accès très difficile par mer, il a suffi, pour rendre la position tout à fait inexpugnable, de la fermer, du côté de la terre, par une muraille de défense. C’est ce qu’on n’a pas manqué de faire à une époque qu’il est d’ailleurs assez difficile de déterminer ; et cette muraille existe encore de distance en distance. C’est la Hague-Dicke. Elle paraît remonter à

  1. De Rostaing, Étude géogr. et hydrogr. sur le poste de Coriallo. Congr. scientif. de France, XVIIe sess. Cherbourg, 1863.