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Le maërl est un mélange de débris de coraux et de coquilles. Il est moins abondant que le trez, mais il contient de 60 à 75 pour 100 de carbonate de chaux et est par conséquent beaucoup plus recherché. Il se trouve surtout en bancs, que l'on drague assez péniblement dans les grands fonds de la baie de Morlaix, et qui, malheureusement, ne se reconstituent qu’avec une extrême lenteur et commencent à s’épuiser.

Une flottille de 30 à 40 gabares, montées chacune par trois hommes et un mousse, est exclusivement employée à recueillir ces engrais de mer. Toutes ces gabares font ordinairement un voyage par jour et apportent en général chacune de 4 à 6 tonnes d’engrais. C’est dans le port de Morlaix une animation continue. En revanche, la pêche y est à peu près nulle, et les essais qu’on y a tentés en vue d’y installer un port d’armement pour la pêche de la morue ont été infructueux. Malgré son voisinage de l’Océan, Morlaix est une ville de tout repos et dont l’esprit, le caractère et les intérêts sont beaucoup moins maritimes qu’agricoles et commerciaux.

Comme Morlaix, Lannion est un port en rivière. Le Guer y débouche dans une grande échancrure qui a une excellente entrée ; il est très riche en saumon, et la sardine et le maquereau abondent aussi dans la rade. Bien qu’à près de 8 kilomètres de la mer, Lannion est un port de pêche assez actif ; mais c’est surtout un centre agricole. On y importe plus de 30 000 tonnes de tangue, de maërl et de goémon, recueillis en grande partie sur les grèves de la petite baie voisine de Saint-Michel, qui est une carrière inépuisable d’engrais marins. Indépendamment de ce trafic spécial, le port a un mouvement commercial de plus de 30 000 tonnes.


IV

De la double baie de Morlaix et de Lannion au golfe de Saint-Brieuc, la côte très en saillie présente une succession ininterrompue de promontoires et d’enfoncemens, dont le relief capricieux est une œuvre géologique toute récente. Au-devant de cette dentelure et à quelques milles à peine au large, l’île de Batz et tous les îlots qui l’entourent, les plateaux de la Méloine et de Triagoz, le groupe des Sept-Iles, les archipels des Héaux et de Bréhat sont les tronçons isolés et les témoins d’un littoral disparu pour ainsi dire d’hier. Entre les îles et le continent, des écueils, des