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par la maxime stéréotypée du temps : Rien n’est au-dessus des forces de l’armée française ! Vive la Pologne ! A Varsovie ! Et si, là-dessus, l’Empereur fût parti en guerre, les matamores, pour se faire pardonner leurs excitations, au jour certain de la déconfiture, eussent été les premiers à provoquer sa déchéance ou à y souscrire. Il le comprit, ne posa aucun ultimatum et, comme l’Autriche, ne répondit pas.


X

Le Tsar, convaincu qu’il n’avait rien à espérer, quoi qu’il fit, de la noblesse et du clergé, trouvant inepte d’accorder à ses révoltés des libertés politiques qu’il refusait à ses sujets fidèles, se résolut à abandonner le système Wielopolski et à russifier le pays. Il en chargea Milutine, l’un des auteurs de l’Emancipation des serfs russes. Milutine, devenu le directeur des affaires polonaises, attribua au paysan la terre dont il avait l’usufruit moyennant une annuité payée au propriétaire par le trésor, après estimation préalable. La publication de ces Ukases (19 février-2 mars 1864) atterra l’insurrection, à laquelle l’Autriche avait fermé sa frontière de Galicie. Partout elle déposa les armes : on mit la main sur les membres du comité occulte et on les pendit.

Le cri suprême du comité agonisant fut en 1864, comme en 1831, une malédiction contre les puissances qui avaient tant parlé pour ne rien faire : « L’intervention de l’Occident n’a fait qu’AGGRAVER les malheurs de la Pologne, au lieu de les atténuer ; elle irritait l’ennemi sans l’intimider, et le rendait seulement d’autant plus farouche contre sa victime… Dans les commencemens, la Pologne se trouvait seulement en face du Tsar et de son année ; le peuple russe restait d’abord indifférent à la lutte : mais à la suite d’une intervention de l’étranger, qui n’a fait qu’éveiller ses susceptibilités nationales, tout en la rassurant sur les suites politiques, c’est la Moscovie tout entière qui a fini par faire cause commune avec son gouvernement ; elle applaudissait désormais à l’œuvre d’extermination et s’enthousiasmait pour les bourreaux… A l’heure qu’il est, elle élève des églises orthodoxes grecques à Vilna en l’honneur de Mourawief. »

Wielopolski, relevé de ses fonctions, s’était d’abord retiré ; avec sa famille à Berlin. Il y vit, en juillet 1864, une dernière fois