Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 4.djvu/218

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ce que nous venons de dire de la lèpre nerveuse est également vrai de l’autre forme. Le bacille se retrouve, en effet, chez tous les malades et dans presque tous les points où il existe des lésions lépreuses (des léprides ou des lépromes, comme disent les dermatologistes), particulièrement lorsque ces lésions sont infiltrées ou ulcérées. Il fourmille dans ces tissus malades et dans les liquides qui s’en écoulent. Et, comme il y a originairement deux sortes de lésions lépreuses, celles qui frappent les tégumens, peau et muqueuses d’une part, et celles qui atteignent les nerfs, c’est aussi dans ces deux organes que se cantonne primitivement le bacille de la lèpre. Il s’y accumule en grandes quantités, formant des amas et des boules épineuses tout à fait caractéristiques. C’est une règle à peu près sans exception que les observateurs qui ont su rechercher le bacille, dans les organes lésés, l’y ont constamment trouvé, sans difficulté. Au contraire, ce n’est que dans des circonstances tout à fait accidentelles et passagères qu’il se rencontre dans le sang et dans les sécrétions des glandes, ces derniers organes étant très rarement altérés dans le cours de l’affection.

L’existence du bacille, vérifiée par les observateurs dans tous les cas de lèpre authentique, a donc la valeur d’un critérium ; elle est de première importance pour éclairer le diagnostic.


Le microbe de la lèpre, depuis le premier moment où il a été signalé, en 1871, par Hansen, et surtout depuis que Neisser eut fait connaître la technique de sa coloration, a été l’objet d’un grand nombre d’études de la part des dermatologistes de tous les pays. C’est un bacille allongé, assez semblable d’aspect à celui de la tuberculose, avec lequel Danielssen a voulu, à tort, l’identifier. Il s’en distingue par toute sa manière d’être. Il pullule, avons-nous dit, dans toutes les lésions lépreuses, de la peau comme des nerfs ; tandis que celui de la tuberculose est clairsemé dans les lésions de cette maladie ; il sécrète une sorte de matière poisseuse qui l’agglomère à ses voisins avec lesquels il forme des amas ou des boules épineuses, tandis que le bacille de Koch vit isolé. Enfin, il s’est montré presque absolument rebelle à la culture, circonstance qui a créé, à l’étude de la contagion et du mode de propagation de la lèpre, des difficultés particulières et qui ne sont pas encore tout à fait levées.

Il ne se cultive pas dans les milieux vivans où on l’a introduit.