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de vue des primes, à refaire au point de vue des droits de quai ; elle est à refaire au point de vue international, par un retour à des idées moins étroites que celles qui ont inspiré notre régime douanier aujourd’hui en vigueur. Après avoir étudié les ports étrangers, il ne faut pas nous borner à considérer le côté matériel de leur organisation et croire que, même en construisant des bassins, des quais, des chantiers, des navires comme ceux que nous admirons en Allemagne, nous procurerons aussitôt et par cela seul à notre pays une activité semblable à celle dont nos voisins nous donnent le spectacle. Il convient de nous pénétrer de l’idée que les ports ne sont qu’un lieu de passage pour les marchandises et les voyageurs ; qu’ils doivent donc avoir, derrière eux, une région industrieuse et commerçante, qui leur envoie de la matière transportable, et, de l’autre côté des mers, des nations riches et puissantes, disposées à échanger leurs produits naturels ou fabriqués contre ceux du pays dont les flottes abordent chez elles. C’est tout le régime économique, tout le régime fiscal, dont l’influence est si grande sur l’organisation industrielle d’un peuple moderne, qui doivent être considérés. La marine marchande n’est pas une cause ; elle est un effet : elle naît en quelque sorte de la prospérité économique d’un pays ; elle en suit le développement ; elle souffre de ses éclipses ; elle doit revivre et grandir, si les habitans et le gouvernement, responsable de la chose publique, savent apporter aux maux constatés les remèdes énergiques qui, seuls, pourront nous maintenir au rang qui doit être le nôtre, et mettre Marseille, Bordeaux, le Havre, en état de lutter avec Anvers, Gênes et Hambourg.


RAPHAËL-GEORGES LEVY.