Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 4.djvu/101

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mais que la Duchesse de Bourgogne prévenue accourut, « quoique fort en désordre, car elle allait se mettre au lit, » et qu’il témoigna beaucoup d’impatience « de se voir en liberté avec elle[1]. »

La campagne, qui dura encore deux mois, finissait tristement. Assurément il y eut de la faute de Boufflers, mais on ne saurait néanmoins lire sans émotion cette dépêche du vieux maréchal à Chamillart : « Je ne puis quasi plus, Monsieur, écrire sur tout ceci sans avoir la larme à l’œil. Je sais mieux qu’un autre combien il est triste de n’avoir à mander que des impossibilités, des misères et des faiblesses. Je n’ai point été élevé à cela, et d’ailleurs mon naturel y répugne fort. Cependant il faut le faire dès à présent ou mentir, ce qui ne sera jamais en moi[2]. »

Quant au Duc de Bourgogne, la Cour et Paris s’accordaient pour ne lui rien imputer et pour faire son éloge. Aussi les poètes, collaborateurs habituels du Mercure, allaient-ils leur train. L’un d’eux s’écriait :


Vous avez battu, Dieu mercy,
Les troupes de Hollande ;
Nous vous disons grand mercy,
Notre joie en est grande.


Un autre lui promettait même une récompense qui, aux yeux du Duc de Bourgogne, aurait été la plus douce :


Continuez, jeune guerrier,
La princesse s’appreste
A joindre le myrte au laurier
Pour votre jeune teste.
N’ayez nulle appréhension,
La faridondaine, la faridondon,
D’estre reçu dans ce pays,
Biribi
A la façon de Barbari, mon ami[3].


En effet, une prompte grossesse de la Duchesse de Bourgogne fut la conséquence de ce retour. Mais, comme il arrivait souvent avec elle, tout se termina par une déception, et la Duchesse de Bourgogne fit une fausse couche quelques mois après.

  1. Dangeau, t. VIII, p. 596.
  2. Pelet, Mémoires militaires, t. II, p. 577. Dépêche de Boufflers ; 5 sept, 1702.
  3. Le Chansonnier, Manuscrits français, 12693. p. 83.