Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/872

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quant aux « intérieurs, » ils seraient éclairés par les fenêtres, toujours comme dans la nature. Pour que rien ne fit obstacle à ce jour venant d’en haut, il faudrait vider les cintres de toute la machinerie, de tous les décors, que l’on emménagerait dans les dessous. Ils monteraient par des ascenseurs, et, pour désencombrer la scène des « praticables » à tréteaux, figurant les terrains accidentés, on n’aurait qu’à installer sous chaque « plan » trois ou quatre presses hydrauliques. Elles inclineraient ou élèveraient, suivant les besoins, chaque morceau du parquet, au gré d’un machiniste unique qui ferait mouvoir le tout d’un poste central, comme l’aiguilleur des chemins de fer.

Sans prétendre d’ailleurs qu’une besogne aussi changeante et obligée de se plier à autant de fantaisies que celle du théâtre puisse être jamais assimilée à des industries mécaniques, il est clair que certaines manœuvres, qui s’exécutent encore à bras d’hommes, comme sous Louis XIV, devront être simplifiées. Les forces hydrauliques et électriques sont déjà appliquées avec succès en Angleterre et en Allemagne. Dans la salle modèle de Wiesbaden, elles réduisent sensiblement l’effectif du personnel nécessaire.


VI

Si nous avons, à ce point de vue, beaucoup à apprendre de l’étranger, nous pouvons servir de modèle sous le rapport des costumes ; non que les nôtres soient plus luxueux ni plus exacts, mais le goût en est meilleur. Quel chemin n’ont-ils pas fait, ces costumes de théâtre, depuis la réforme commencée par une danseuse, Mlle Salé, au XVIIIe siècle, continuée par un tragique, Talma, achevée enfin par deux dramaturges : Dumas père et Victor Hugo ! « Les toges des sénateurs de Catilina, en 1748, sont, dit un contemporain, en toile d’argent bordée de pourpre, avec des vestes de toile d’or, le tout festonné et enrichi de faux diamans. On a trouvé ce Sénat-là un peu pomponné ; cela vaut mieux que s’il eût été en vieil oripeau. »

Pour désemplumer et dégalonner les héros grecs et romains, ce ne fut pas une petite affaire ; comme d’ailleurs pour transporter chaque personnage de la convention dans la réalité : on procéda par étapes, on « tricha » légèrement d’abord pour faire accepter au public des tenues et des types dont la nouveauté le