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feu sur la ville en haut, baissez la herse du 4. Ce tamaris est raté, il faut le changer. Faites monter quelques machinistes sur ce praticable. Vous savez qu’il y aura une projection sur la maison ; — je voudrais le mur plus monumental ; — vous devez décolorer la mer pour le déclin du jour (ce que l’on réalise en mettant d’abord le rouge, puis en baissant le blanc, auquel succède le bleu qui donne l’obscurité diaphane). Vous avez vingt minutes pour exécuter cet effet ; prenez-en le « repère. » On se rafraîchit les yeux en faisant baisser le rideau, pour le relever ensuite et avoir l’impression plus nette du tableau. — « C’est bien joli, » dit le directeur enchanté. Des après-midi entières se passent en tâtonnemens, en essais multiples, pour mettre d’accord tous ces feux qui doivent se fondre en un harmonieux ensemble.

Les appareils ordinaires, qui garnissent nos habitations, s’allument ou s’éteignent en tournant un bouton qui établit ou coupe le courant électrique. Leur lumière est invariable. Au théâtre, pour graduer l’intensité des lampes Edison, obtenir un état intermédiaire entre le plein éclat et le noir opaque, et passer, si l’on veut, de l’un à l’autre par l’atténuation insensible du rayonnement au crépuscule, on se sert du « rhéostat. » Chacun sait que l’électricité perd de son pouvoir lumineux à mesure que s’allonge le chemin qu’elle doit parcourir ; et nul n’ignore que les fils, transmetteurs du courant, opposent à son passage plus ou moins de résistance suivant leur métal et leur grosseur.

Les rhéostats, — il en est de plusieurs systèmes, — ont pour but d’organiser ces résistances, de fatiguer méthodiquement le courant, eu le promenant sur des fils de maillechort qui se replient en d’interminables zigzags, — « spires » en termes techniques, — jusqu’à ce qu’il arrive au point d’anémie, — 55 volts, — où il est incapable de faire briller les lampes. Le maillechort, alliage de zinc, de cuivre, de fer et d’étain, a été choisi pour son défaut, devenu ici un mérite, d’être fort mauvais conducteur de l’électricité.

Grâce au jeu d’orgues et à son rhéostat, chaque herse, chaque portant, aussi bien que le lustre ou la rampe, peut ainsi recevoir le courant fort ou faible, suivant qu’il est recueilli frais ou exténué à tel ou tel zigzag de son voyage ; et, lorsque le soleil se lève sur le théâtre, c’est que des. boutons, glissant dans leur rainure, envoient peu à peu. à toutes les lampes un courant de