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28 mètres sur une largeur de 32. Cette superficie énorme de 900 mètres est plus vaste qu’aucune autre au monde ; mais le public lieu aperçoit que la moitié. Il n’embrasse que la portion de la scène encadrée par le rideau, c’est-à-dire 16 mètres de large ; tout au plus son regard plonge-t-il obliquement jusqu’à la « butée, » où le dessous du parquet cesse d’être machiné. Ce qu’il ne voit pas ce sont d’abord, le long des deux murs latéraux, les magasins — les « tas » — où les châssis de décors sont en réserve, puis un espace libre pour la circulation : les coulisses.

Regardez à terre : de distance en distance, le plancher est gercé de longues fentes — les « costières. » — Ces interstices, bouchés par les « trapillons )> dans tout le milieu du théâtre, demeurent ici ouverts pour les manœuvres. Ils sont séparés les uns des autres par les « rues ; » lesquelles sont des successions de « trappes » carrées, posées bout à bout, de manière à s’enlever par morceaux, une à une, ou à glisser ensemble dans les « tiroirs, » à droite et à gauche, lorsqu’une « rue » s’ouvre dans toute sa longueur.

Cette disposition est uniforme sur toutes les scènes. Indispensable aux féeries, aux « pièces à tiroirs » suivant le terme en usage, elle se simplifie beaucoup dans les spectacles de genre, où le décor ne joue qu’un rôle secondaire. Cependant l’exiguïté des coulisses est toujours une grande gêne. Au nouvel Opéra-Comique, que l’on s’est préoccupé de doter surtout d’escaliers, de corridors et de foyers de belle taille, il est resté si peu de place pour la scène que c’est un véritable tour de force d’y faire mouvoir les figurans. On en est réduit, dans Mireille, à faire passer la procession par le cabinet du directeur.

Non seulement il ne s’y peut exécuter aucuns changemens à vue, puisque les décors sont logés dans une espèce d’armoire, dont l’accès ressembla à celui d’une tirelire, mais cette resserre même est si étroite que les châssis de quatre ou cinq actes suffisent à l’emplir et que, pour donner deux représentations le même jour, il faut chaque fois faire venir à 6 heures le matériel de la soirée, dans des chariots qui emportent celui de la matinée au boulevard Berthier. C’est aux fortifications, à l’extrémité de Clichy, qu’est maintenant situé le magasin de décors commun aux théâtres subventionnés. L’État a récemment vendu les locaux affectés à cet usage qu’il possédait place Louvois et rue Richer. Ce dernier bâtiment avait aussi abrité naguère le bagage