Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/850

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’asseoir et de fumer, le malheureux s’occupe comme il peut. Au temps où le service de nuit, — la « permanence, » — existait, les pompiers de l’Odéon charmaient leurs loisirs en se postant sur les toits en terrasse, d’où ils plongeaient, par les fenêtres éclairées, un œil sympathique dans les chambres avoisinantes. Licences assez vénielles sans doute ; mais, à chaque théâtre, les pompiers changent chaque soir ; ce ne sont jamais les mêmes que l’on envoie. Par suite, nul n’est familier avec les locaux où il se trouve ; il s’égare parfois dans le dédale des escaliers.

Une commission spéciale passe en revue des dispositions nouvelles contre l’incendie, s’en déclare enchantée et, son inspection finie, demande au pompier qu’elle rencontre par où l’on peut sortir : « Ma foi, je n’en sais rien, » répond imperturbablement celui-ci. Dans les autres capitales, l’officier de pompiers est un ingénieur, et ses hommes sont des praticiens rompus à leur besogne, comme nos gardes républicains, habiles à contenir les foules sans les faire crier. A Paris, bien qu’il ait été souvent question de former un corps de pompiers de carrière, soldé par les compagnies d’assurances, nul édile ne s’en est encore avisé. Les théâtres entretiennent seulement des veilleurs civils, dont le rôle commence à minuit et dure jusqu’au lever du rideau, le lendemain soir.

Depuis l’époque lointaine où il lui suffisait des simples tréteaux de bateleurs, le matériel du spectacle est allé se compliquant d’âge en âge jusqu’aux somptueux édifices contemporains : l’Opéra de Francfort a coûté 12 millions de francs, celui de Vienne 18 millions, celui de Paris 36 millions. De cette cage en maçonnerie que représente la « scène, » du haut en bas de laquelle se meut un peuple, une seule tranche est visible de la salle : le terrain où évoluent les acteurs, semblable à un damier mobile, dont chaque case porte un numéro et un nom. A gauche du spectateur est le « jardin, » à sa droite la « cour ; » termes qui remplacèrent, au moment de la Révolution, ceux de « côté du roi » et de « côté de la reine ; » les deux loges souveraines étant, aux Tuileries, l’une du côté du jardin, l’autre du côté de la cour du Carrousel.

Le devant de la scène, c’est la « face, » le fond s’appelle le « lointain, » et la partie intermédiaire le « trumeau. » D’un extrême à l’autre le sol se divise en un certain nombre de « plans ; » une dizaine à l’Opéra, donnant une longueur de