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pouvons mettre tout de suite les hommes à l’abri. Six obus viennent frapper le même point avec une précision remarquable : une grande brèche est faite dans le portique.

Au même moment, les Japonais et les Italiens font une seconde sortie pour prendre un canon. Ils échouent. Le capitaine Tatsugoro-Ando est tué, et deux hommes sont blessés.

La canonnade cesse ; les coups de fusil diminuent également, pour devenir très rares pendant la nuit. Nous n’avons jamais cependant le calme complet qu’il nous faudrait pour pouvoir faire reposer un peu nos courageux soldats.

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8 juillet. — La maison Saussine et la petite cour située au sud de cette maison sont occupées par 12 matelots ; MM. Picard-Destelan et Bartholin y ont aussi leur poste de combat, près de moi. À onze heures, un premier coup de canon est dirigé sur cette maison ; le toit est effleuré. Le commandant Thomann vient au même moment me rejoindre dans la petite cour ; nous nous réfugions à l’intérieur, près des hommes. Je donne l’ordre à six d’entre eux d’aller se réfugier dans le Salon bleu (aile est des appartemens du ministre), et nous restons avec cinq marins et le quartier-maître Pesqueur devant les meurtrières.

Un deuxième obus enlève la partie supérieure du pignon sud et blesse légèrement Saliou ; un troisième, tiré par un autre canon, fait une brèche dans le pignon nord, et blesse le canonnier auxiliaire Le Gat. Je considère alors comme une imprudence de rester plus longtemps, d’autant plus que l’ennemi est parfaitement invisible, et que nous ne pouvons rien faire contre cette canonnade. Je fais partir tout le monde. En sortant, nous rencontrons le capitaine Labrousse, qui surveille la partie nord de notre ligne, et qui vient m’annoncer que les Chinois ont pénétré dans la cave de M. Pichon, où ils élèvent une barricade. Le commandant s’avance d’un pas ou de deux pour regarder par-dessus le mur de la petite cour, quand un quatrième obus éclate sur le pignon du Hall, et lui broie la poitrine ; il tombe dans nos bras en poussant deux cris sourds. Nous le remettons à deux matelots, qui l’emportent dans le salon de M. Pichon où il meurt en arrivant. Un deuxième éclat lui avait cassé en même temps le bras droit.

Les Chinois, massés dans l’est, nous attaquent une fois de plus, mais en restant cachés, comme toujours. Il est à craindre,