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que ne le fut Prévost-Paradol, et il eût été victime de sa finasserie. Je ne sais qui obtint le désistement de Laboulaye ; nous n’avions plus alors aucune raison de repousser Thiers qui avait accepté notre programme, mais nous maintînmes Guéroult contre Paradol. Un troisième candidat essaya de lui disputer la place, Augustin Cochin. Cochin portait avec honneur, grâce et talent un des plus beaux noms de la bourgeoisie parisienne : il avait été maire de l’arrondissement, y avait laissé les plus affectueux souvenirs, y possédait dans le quartier une clientèle personnelle nombreuse et dévouée ; son catholicisme fervent était éclairé et libéral. Les catholiques crurent qu’en l’opposant à Guéroult, ils procureraient une victoire significative à la cause de l’indépendance pontificale que Prévost-Paradol ne représentait pas autant, et dont Guéroult était l’adversaire prononcé.


IV

Carnot, Garnier-Pagès, Marie comprirent le fiasco ridicule auquel ils s’exposaient s’ils ne se ralliaient pas à notre dictature déjà sanctionnée par leurs amis Pelletan et Jules Simon ; ils recommandèrent notre liste. Nefftzer, au contraire, entra en campagne contre trois de ses noms : Havin, Guéroult, Darimon. Il ouvrit la polémique par la publication de la lettre qui motivait son refus d’assister à notre réunion chez Jules Favre, et à laquelle je n’avais pas cru devoir répondre. Le reproche qu’il nous adressait d’opprimer le suffrage universel et d’imiter les procédés de Persigny ne fut pas pris au sérieux. Comme le ministre, en effet, nous indiquions hautement nos candidats, mais nous ne disposions à leur profit ni des maires, ni des préfets, ni des gendarmes, ni, en un mot, de toute une administration.

Le Courrier du Dimanche fit plus encore. Pour mieux atteindre les trois candidats dont il ne voulait pas, il attaqua ceux qui les avaient adoptées. Un de ses meilleurs écrivains, Weiss, n’en épargna aucun : Jules Favre était trop amer. Picard trop léger, l’impartialité d’Emile Ollivier visait trop à plaire, Darimon et Hénon ne faisaient que nombre ; cette liste était tyrannique, digne pendant des candidatures officielles ; elle était le 18 brumaire électoral des Cinq.

Girardin défendit notre liste et nos personnes avec un admirable