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ouvriers y ont-ils fermé les oreilles, et, après quinze jours de pourparlers très actifs, mais parfaitement stériles, ils ont persisté dans leur refus d’accepter les propositions du gouvernement. Voilà le fait brutal Tout le monde espérait qu’une solution amiable interviendrait avant le 28 avril. On l’a attendue en vain, et, quand le jour fatidique s’est levé, il a bien fallu, conformément aux décisions du congrès de Lens, procéder au référendum.

Nous ne pouvons, à l’heure où nous écrivons, qu’en indiquer sommairement le résultat. Et encore le pouvons-nous ? Il y a eu un si grand nombre d’abstentions dans les scrutins disséminés sur tous les points du territoire, que cette grande enquête semble frappée d’avance de nullité. Dans certains centres ouvriers, et des plus considérables, comme à Saint-Chamond, le scrutin n’a même pas été organisé ; Dans le Pas-de-Calais, sur 50 000 ouvriers, 20 000 seulement y ont pris part. Mais l’intérêt principal était à Montceau-les-Mines. Là, une très forte majorité s’est prononcée pour la grève. Un millier d’ouvriers se sont abstenus : ils relèvent du syndicat jaune. Comment espérer, en présence de cette majorité de montcelliens qui veulent la grève générale, que les résultats incomplets et douteux des autres centres miniers auront préparé une solution et se présenteront avec une autorité suffisante pour la faire accepter ? Au reste, à mesure que les résultats des scrutins nous parviennent, la majorité se détermine de plus en plus en faveur de la grève générale ; et, quant aux abstentions, on rappelle que le congrès de Lens les avait attribuées d’avance à la majorité. Cette première consultation des ouvriers s’est faite avec gaucherie et maladresse. Elle ne résout rien ; elle sera sans doute une nouvelle déception après tant d’autres. La situation reste la même, mais elle s’aggrave en se prolongeant. L’histoire de la grève de Montceau n’est pas finie, et jusqu’ici elle se résume dans le mot d’impuissance, puisque tous les moyens employés pour la clore ont échoué l’un après l’autre. Le dénouement est plus incertain et peut-être plus lointain que jamais.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur -Gérant,

F. BRUNETIERE.