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I

Il n’existe pas en Chine de système monétaire avec étalon déterminé : l’unité porte le nom de taël, mais représente, selon les lieux, un poids et un titre différens d’argent. D’après les conventions qui l’ont établi, le taël de Canton devrait être de 37 gr. 783 d’argent ; dans la pratique, il n’est que de 37 gr. 58. Le taël employé par le commerce international est celui de Shanghaï, qui correspond à 36 gr. 65. Quant au taël haikwan, destiné au règlement des droits d’importation, la direction des douanes en fixe la valeur en monnaies européennes au début de chaque mois. C’est à Shanghaï que se fabriquent les lingots d’argent fin (sycee, littéralement sai cee, soie pure), pesant environ 1 840 grammes et valant par conséquent une cinquantaine de taëls : ces lingots ne servent pas aux usages courans, mais aux comptes de banque et aux compensations. La monnaie d’argent qui circule le plus, en dehors des lingots, est la piastre mexicaine, que les essayeurs chinois poinçonnent après l’avoir vérifiée et qui prend alors le nom de chopped dollar. Le taël, monnaie de compte qui, théoriquement, devrait être égale à une once d’argent pur, se divise en 10 tsien (mace en anglais) ; le tsien en 10 fen ou candarin ; celui-ci à son tour en 10 li.

Le métal argent n’est pas aussi répandu qu’on se l’imagine communément : le rapport de la mission lyonnaise d’exploration commerciale dans le pays (1895-1897), nourri d’une foule de renseignemens de la plus haute valeur, fait à cet égard une comparaison pittoresque : la Chine, dit-il, est une sphère dont l’enveloppe est en argent et dont la teneur en ce métal diminue à mesure qu’on s’éloigne de la périphérie. C’est dans les ports et dans la partie des provinces orientales qui sont en relations suivies avec les étrangers que les monnaies et lingots d’argent apparaissent en plus grande quantité ; dans l’intérieur du pays, dans les hautes vallées des fleuves, la monnaie de billon, la sapèque, composée d’un alliage de cuivre et de zinc, auxquels s’ajoutent souvent du plomb et de l’étain, règne en souveraine. De valeur infime, ces pièces, percées d’un trou central, sont réunies par ligatures de 400, 500 ou 1 000 unités ; les salaires des ouvriers, les loyers, les fermages, les prix des denrées de première nécessité, s’expriment en sapèques.