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les périodiques populaires et à les soutenir au moyen des annonces. Les syndicats qui ont transformé le journalisme du Nouveau Monde sortirent, à l’origine, d’une inspiration féminine, celle, dit-on, de Mrs Croly. En tous pays, d’ailleurs, il n’y a guère aujourd’hui de feuille politique ou autre qui ne compte des collaboratrices et des correspondantes.

L’Allemagne témoigne une faveur croissante aux femmes publicistes : la baronne de Suttner, au leur d’un roman célèbre sur l’arbitrage et la paix universelle, y dirige le périodique très répandu : Die Waffen nieder (A bas les armes). Mais on ne saurait se dissimuler qu’au point de vue économique, le petit journalisme, celui qui fournit des articles intitulés, par exemple, Ce que mangent les reines, soit plus rémunérateur que le journalisme littéraire et sérieux.

L’a médecine a aussi beaucoup d’adeptes : rapport très remarquable du docteur Sarah Hackett Stevenson, une éminente praticienne de Chicago. Elle part d’une idée générale, indique trois époques dans l’évolution de la race humaine et du sort de la femme. Quand l’homme chassait pour sa subsistance, la femme se confinait aux emplois élémentaires de l’agriculture et de l’industrie ; une seconde période fut caractérisée par la division du travail, devenu spécial pour l’homme, universel pour la femme ; puis surgirent les industries productives : la conquête de la nature par les machines commença, la femme cessa d’être tisserand, boulanger, etc.. Maintenant ce sont les idées qui se dressent au gouvernail, et les idées ne sont ni mâles ni femelles ; que la femme le veuille ou non, elle a un rôle à jouer dans l’évolution sociale qui s’est produite. Comment ne se tournerait-elle pas vers les sciences médicales, dont Descartes fut le premier à dire que, si le perfectionnement de l’espèce humaine est possible, c’est là qu’il faut en chercher le moyen ? Mais, bien loin de tirer vanité de la multitude de femmes médecins qui existent dans son pays, cette Américaine de Chicago qui cite notre vieux Descartes souhaite que le fléau des Facultés de fantaisie et des diplômes irréguliers cesse au plus vite, et qu’une hiérarchie médicale uniforme soit établie dans tous les pays pour empêcher le demi-savoir et les maux qui en découlent.

L’exemple de l’Amérique a porté des fruits. Une doctoresse allemande du nom de Tiburtins raconte que, lors de sa visite à New York, elle fut frappée de l’œuvre accomplie par les femmes