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ministres des Affaires étrangères et leurs ambassadeurs y ont été pour beaucoup. Nous rendons pleine justice à la politique intelligente et bienveillante qui a été suivie à Rome par M. Visconti-Venosta et dont M. Prinetti a hérité sans la modifier, pendant que le comte Tornielli en était auprès de nous le représentant fidèle. On reconnaîtra non moins équitablement que nos ministres des Affaires étrangères, et, pour parler seulement des derniers, que MM. Hanotaux et Delcassé n’ont rien négligé pour faire comprendre à l’Italie quelles étaient nos véritables dispositions envers elle, pendant que M. Camille Barrère, notre ambassadeur à Rome, secondait leurs vues avec l’ardeur d’une conviction personnelle qui devait vaincre bien des obstacles. Il fallait dissiper des préventions d’autant plus tenaces qu’elles ne reposaient sur rien de défini. On s’y est appliqué avec persévérance. Déjà, avant la fin du dernier règne, ces efforts avaient été en grande partie efficaces. On n’a pas oublié que nous avons été les premiers, il y a deux ans, à faire une démonstration maritime dont celle qui vient d’avoir lieu à Toulon n’a été que la reproduction, et sans doute la conséquence. Les fêtes de Cagliari devaient avoir un lendemain. Il était naturel que le Président de la République, dans le voyage qu’il faisait à Toulon, reçût à son tour Je salut du nouveau roi d’Italie. Mais les choses en elles-mêmes ne sont rien : la manière de les faire leur donne seule toute leur signification. La présence du duc de Gênes à la tête de l’escadre italienne, le nombre des navires qu’il commandait, son langage, son attitude, les télégrammes amicaux échangés entre M. Loubet et le roi Victor-Emmanuel, sont autant de circonstances qui soulignent en quelque sorte la manifestation d’hier et lui donnent toute sa valeur.

Il faut dire un mot, pour le liquider tout de suite, de l’incident des bateaux russes, incident qui a paru très gros pendant quelques jours, à en juger par les commentaires dont la presse l’a entouré, et qui s’est trouvé, comme d’ailleurs nous le pensions bien, n’avoir pas la moindre importance. Quelques jours avant l’arrivée à Toulon de M. le Président de la République, trois bateaux russes, venant de Gênes, y ont fait leur apparition. Grande joie parmi nos populations, qui voient toujours avec plaisir des navires russes et sont toujours prêtes à les acclamer. Mais quelle n’a pas été la déception éprouvée, lorsque les navires russes sont partis comme ils étaient venus ! Qu’est-ce que cela voulait dire ? En quelques jours, des flots d’encre ont coulé pour éclaircir la question, et, naturellement, ils n’ont pas manqué de l’obscurcir davantage. Les interprétations les plus contradictoires se