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westphalien semblait-il pressentir certaine formule sur le droit et la force, qui, depuis lors, a fait fortune.

C’est pourtant de cette dureté d’âme, de cet impitoyable orgueil, que vint le salut de la ville. Les habitans, dans leur détresse, s’adressèrent derechef aux États de Hollande. On conserve la lettre où ils imploraient cet appui : « Très hauts et très puissans seigneurs, la grande estime que nous faisons de votre générosité nous oblige à avoir recours à votre protection contre un tyran qui nous opprime. Nous l’appelons tyran, puisqu’il nous persécute, quelques efforts que nous ayons faits pour lui plaire ; et toute la terre est témoin que, s’il était bon maître, nous serions des sujets soumis. Mais, sans vous informer d’une vérité si connue, nous vous prions de vous ressouvenir que vous avez toujours été le refuge des affligés et l’asile des innocens, et que jamais service ne fut plus juste que celui que nous vous demandons… » Les États, sur cet humble appel, se bornèrent tout d’abord à proposer aux deux parties leur médiation pacifique. Trois députés furent envoyés pour négocier l’accord entre l’évêque et ses sujets. Galen leur fit accueil ; mais, sitôt qu’ils voulurent pénétrer dans la ville, il arrêta leur marche, confisqua leurs papiers, et déclara qu’il les gardait prisonniers dans son camp. Grande fut, à cette insulte, l’indignation des États Généraux. L’ordre fut expédié de rassembler des troupes ; le gouverneur de Maastricht en eut le commandement ; des billets pleins d’encouragemens furent secrètement jetés dans la ville assiégée : « Courage, Munster, y lisait-on, les Hollandais viennent à ton secours[1] ! ».

Quelques jours plus tard, en effet, Galen apprit par ses espions qu’un corps de l’armée hollandaise marchait pour débloquer la ville. Il comprit que, cette fois, « l’affaire devenait sérieuse, » que la bravade n’était plus de saison. Fort à propos, sur l’entrefaite, le chapitre se présenta pour accommoder la querelle ; l’évêque accepta l’arbitrage ; on fit des concessions mutuelles. L’amnistie générale fut convenue pour les faits passés, et la ville consentit à recevoir une garnison, qui ne devrait, en aucun cas, excéder cinq cents hommes. L’accord s’établit silices bases. Dans les premiers jours de décembre, — après un siège où deux mille hommes, dit-on, avaient péri de part et

  1. Annales des Provinces-Unies.