Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 2.djvu/235

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




28 février.


Depuis que le cabinet actuel est aux affaires, il est rare qu’il n’y ait pas une grève sur un point ou sur un autre du territoire. Nous n’accusons pas le gouvernement de le faire exprès ; rien ne serait plus injuste ; il trouve au contraire, et ses amis trouvent avec lui, que la présence d’un socialiste parmi ses membres est une satisfaction si grande donnée au prolétariat français qu’elle doit lui suffire pour longtemps. Mais le prolétariat ne l’entend pas de la sorte. Il lui importe peu que M. Millerand soit ou non ministre, si le fait reste sans conséquences pratiques et immédiates. Des gens qui souffrent, et cela d’autant plus qu’on ne cesse pas un moment d’appeler leur attention sur leurs souffrances comme pour les leur rendre plus sensibles, ne se contentent pas à si bon compte : il leur faut des avantages plus substantiels. À quoi bon avoir un des leurs au gouvernement, si ce n’est pas pour gouverner par son intermédiaire ? L’entrée de M. Millerand dans le cabinet a fait naître chez eux des espérances confuses, mais ardentes, et, forts d’un appui qu’ils estimaient pouvoir escompter, ils se sont mis en grève un peu partout et ont sommé le gouvernement d’intervenir entre les patrons et eux. Dans cette voie, ils ont déjà rencontré plus d’une déception : malgré sa bonne volonté, le ministère n’a pas pu faire tout ce qu’on attendait de lui. N’importe : les déconvenues du prolétariat ne l’ont pas découragé ; il poursuit toujours une revanche ; et, lorsque la grève vient à cesser quelque part, c’est pour recommencer ailleurs, avec une continuité sans interruptions. Hier, celle des tullistes de Calais prenait fin ; mais déjà celle de Montceau-les-Mines avait fait son apparition, et bientôt à celle de Montceau-les-Mines est venue se joindre celle de Chalon-sur-Saône. Où en est-on aujourd’hui ? D’après les dernières nouvelles