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On ajoute à la matière une petite quantité de soufre et l’on chauffe le mélange au-dessus de 100°. Cette opération conserve à la substance son élasticité, même aux températures basses ; elle permet aux différentes parties d’entrer en contact les unes avec les autres sans s’attacher ; enfin elle la protège contre les altérations. Aussi est-ce seulement de cette invention que date le rôle industriel du caoutchouc.

Ses principaux usages dérivent de son extrême élasticité. Une lame de caoutchouc peut être allongée jusqu’à quintupler de longueur, et revenir ensuite à ses dimensions primitives. Cette propriété lui permet d’intervenir dans les appareils mécaniques à la façon ordinaire des corps élastiques, c’est-à-dire pour transmettre les actions brusques et les transformer en actions progressives ; en d’autres termes, pour diminuer l’effet brisant des chocs. De là l’emploi des caoutchoucs pleins ou des pneumatiques adaptés aux roues des bicyclettes et des voitures.

Les gaz peuvent se dissoudre dans le caoutchouc. M. d’Arsonval a montré récemment que, plongés dans de l’acide carbonique à haute pression (de 1 à 50 atmosphères), les fragmens de cette substance absorbaient une grande quantité de gaz, se gonflaient en se ramollissant et décuplaient de volume. Ils reviennent ensuite, lentement, à leurs dimensions ordinaires, en abandonnant le fluide momentanément incorporé. En définitive, les membranes de caoutchouc sont perméables aux gaz, et si l’on analysait, au bout d’un certain temps, le contenu d’un pneumatique, maintenu sous l’eau, on constaterait que, sans aucune fissure, une grande partie aurait disparu : l’acide carbonique plus vite, puis l’oxygène. Et, au bout du compte, c’est l’azote qui subsisterait.

Les plantes qui fournissent le caoutchouc se présentent sous deux formes, à l’état d’essences forestières de grande taille, ou à l’état de lianes. On les trouve dans toutes les contrées du globe à l’état spontané. On signale chaque jour de nouvelles trouvailles.

Ce qui nous intéresse le plus, à cet égard, ce sont nos colonies africaines. L’exploitation à Madagascar a commencé en 1851 ; elle a pris en ces dernières années une assez grande extension pour qu’il ait été permis de dire que tous les colons avaient la fièvre du caoutchouc.