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instruction primaire, secondaire et supérieure, ce qui ne veut pas dire que ces deux derniers titres correspondent encore à de bien sérieuses réalités. Mais, depuis que la première école normale, fondée à Stamboul sous Abdul-Aziz, forme des filles pauvres à la carrière de l’enseignement, qu’elles vont ensuite exercer dans l’intérieur, un vif désir de culture intellectuelle s’est répandu parmi les dames turques. Plusieurs d’entre elles écrivent, et surtout elles se font professeurs, portant des leçons à domicile et remplissant un rôle de pionnier dans l’ordre des idées.

Ce n’est jamais qu’un nombre relativement petit de jeunes filles qui passe de l’instruction secondaire à l’Université. Des rapports très remarquables sont lus par des Allemandes, des Scandinaves, des Anglaises appartenant à cette élite. Intéressant entre tous, celui d’une des trois premières étudiantes de Girton College, miss Innes Lumsden, attachée aujourd’hui à l’Université de Saint Andrews en Écosse. Nous voyons qu’après tout la France accorde plus de privilèges aux étudiantes en médecine et en droit que n’en octroie la Grande-Bretagne, où hommes et femmes ne sont reçus sur un pied égal que dans les toutes nouvelles Universités du Nord et du pays de Galles ou bien en Écosse ; il n’en est pas de même à Oxford et à Cambridge ; pourtant, sans pouvoir être admises à recevoir le degré, elles passent tous les examens, et on sait quels succès éclatans elles ont remportés ces dernières années.

Mais chez nous seulement on peut dire que les femmes ont, par rapport à l’enseignement d’université, tous les mêmes droits que les hommes, presque sans exception. C’est une Allemande qui vient nous le prouver, le docteur Käthe Schirmacher, à qui l’on doit déjà une excellente monographie sur la condition des femmes dans les différens pays[1]. De 1875 à 1888, 362 femmes, dont 55 étrangères, ont pris en France leurs degrés universitaires. Les statistiques fixent le nombre de nos étudiantes à 817 contre 28 264 étudians. Dans la seule Université de Paris, il y a 245 femmes : 87 étudient la médecine, 53 la pharmacie, 37 suivent les cours de la Faculté des lettres, 18 ceux de la Faculté des sciences, et deux étudient le droit. Beaucoup de Françaises, se destinant à l’enseignement des langues étrangères,

  1. Librairie A. Colin.