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abondante pâture littéraire, et les qualités maternelles de la femme, ses aptitudes d’éducatrice trouvent ici à s’employer ; son conseil est souvent demandé par des gens de culture très diverse. Elle doit avoir beaucoup de tact, outre les connaissances acquises en quatre années d’études spéciales couronnées par des examens qui portent sur l’histoire littéraire, le mécanisme de la typographie, la bibliographie appliquée, la lecture des manuscrits, les langues, etc. On constate le soin particulier que niellent les femmes à dresser les index, tables, répertoires, catalogues. Il y a des bibliothécaires femmes au Canada, en Australie, dans l’Afrique du Sud et jusqu’à Honolulu ; en Suède, les femmes sont surtout employées comme assistantes ; en Suisse, le musée cantonal de Fribourg a une directrice ; en France, Mlle Pellechet a dressé le catalogue des incunables. En Angleterre, les emplois de bibliothécaires féminins sont moins nombreux et moins bien rétribués qu’en Amérique ; mais, comme en Amérique, les femmes se poussent au premier rang pour les places de secrétaires, de sténographes, pour la tenue des livres, le travail de bureau, la correspondance commerciale. L’écriture à la machine fait vivre une armée de jeunes filles. Ce sont là, par excellence des professions nouvelles.

Il y en a aussi parmi les travaux manuels. L’influence de Ruskin et de Morris a produit en Angleterre le réveil des arts décoratifs, élevés souvent au niveau du grand art, par exemple la sculpture sur bois. L’école spéciale où on l’enseigne à Londres est dirigée par une femme. Au collège de Reading, une autre femme est à la tête de certaine section dont le but paraît être de développer l’imagination de l’élève autant que l’habileté de ses doigts, de la détourner surtout des imitations prétentieuses. La reliure prospère entre les mains d’une guilde féminine. Il n’y a guère plus de dix ans, ce métier était tout entier accaparé par les hommes ; quelques femmes de goût, qui avaient passé par les écoles d’art, découvrirent que les couvertures de livres offrent un champ illimité à la fantaisie, puisqu’on peut y exprimer symboliquement le contenu du livre lui-même. De courageuses ouvrières s’approprièrent le maniement assez dur des outils, et, bientôt réussirent à exceller dans une profession qui a le grand mérite de n’être pas précaire. Les commandes ne s’arrêtent jamais.

En photographie, les Anglaises s’efforcent de surpasser la