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associations religieuses. Quant à savoir si les socialistes ont vraiment garanti leur avenir par une disposition semblable, c’est une autre affaire, et nous ne la discuterons pas aujourd’hui. Contentons-nous de dire qu’ils nous ont enseigné comment, au moyen de quatre ou cinq petits mots intercalés dans un texte de loi, on peut en excepter qui on veut.

À cette franchise nous répondrons par une autre. En soi, le fait d’avoir mis les congrégations religieuses en dehors de la loi sur les associations n’a rien qui nous choque. Les sociétés civiles ou commerciales, les associations, et enfin les congrégations, bien qu’elles procèdent d’une même conception de la force qu’acquièrent les hommes et les choses elles-mêmes par leur groupement, sont des degrés distincts de l’application de cette idée générale, et constituent des êtres moraux d’un caractère très différent. On n’a jamais confondu les sociétés avec les associations ; on a tort de vouloir confondre les associations avec les congrégations. Quand nos adversaires disent qu’il y a entre elles une différence essentielle, ils sont dans le vrai. Aussi n’est-ce pas nous qui avons établi la confusion. Les quatre groupes avancés des gauches se sont réunis avant l’ouverture de la discussion, et ont délibéré pour savoir s’il n’y avait pas lieu de distinguer les associations des congrégations et de légiférer séparément pour les unes et pour les autres. Après y avoir mûrement réfléchi, ils se sont prononcés pour la négative, croyant qu’il serait plus facile d’étouffer les congrégations dans une loi générale sur les associations. C’était peut-être une illusion de leur part. Les libéraux n’ont pas protesté, parce qu’ils ont eu une illusion contraire, à savoir qu’il serait plus difficile d’arriver au but qu’on se proposait, si l’on confondait les congrégations avec les associations, les premières devant bénéficier, ils l’espéraient du moins, de la liberté que l’on accorderait aux secondes. Mais la force des choses a prévalu avec l’amendement de MM. Groussier et Fournière. Ce n’est pas la même chose de mettre en commun ses connaissances ou son activité, et de se réunir pour cela de temps en temps, ou de mettre en commun des personnes, et de les faire vivre ensemble sous une règle très étroite. Ce n’est pas la même chose d’associer ses efforts pour un but limité et quelquefois très rapproché, ou de fondre des personnes dans une congrégation éternelle, en vue d’un objet qui est éternel lui-même, qui échappe au temps et presque à l’espace, en ce sens qu’il est le même toujours et partout. Il est donc parfaitement admissible que les associations et les congrégations ne soient pas traitées sur le même pied. Qu’on mette les congrégations à part des