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besoin de se faire autoriser. Il y en a beaucoup qui n’ont pas besoin de ces droits et qui, par conséquent, ne se l’ont pas autoriser. Mais toute communauté qui veut posséder les droits civils, qui veut les exercer, soit acquérir, soit aliéner, qui veut surtout, ce qui les intéresse quelquefois le plus, recevoir des donations par quelque disposition testamentaire, est obligée de se faire reconnaître.

« Je répète qu’aucune communauté n’est forcée de demander l’autorisation, quand elle ne le désire pas ; cela n’est pas contestable.

« Je prie donc qu’on ne dise pas qu’une communauté non autorisée est, par cela même, une communauté illicite, parce qu’elle n’a pas encore demandé l’autorisation. Elle a usé d’un droit en ne la demandant pas[1]. »

À ces affirmations si formelles, émanant d’un homme si considérable et si compétent, on ne voit à opposer, dans le rapport présenté sur le nouveau projet de loi, que les lignes suivantes, assurément sommaires : « Décider qu’une loi sera nécessaire pour autoriser l’existence des congrégations religieuses, est-ce donc autre chose que de consacrer, par un texte nouveau et clair, le système de la législation actuelle ? » Non seulement c’est faire autre chose que de consacrer le système de la législation actuelle, mais c’est faire le contraire, puisque la législation actuelle n’oblige pas les congrégations religieuses à demander l’autorisation, et que le projet de loi les y contraint sous peine d’amende et d’emprisonnement ; puisque la législation actuelle donne, en réalité, aux congrégations la liberté d’association ; et que, en réalité, la loi nouvelle la supprimerait.

En résumé, quand on légifère sur la matière de l’association, si l’on veut être sincère, respectueux des principes et du droit, il n’y a qu’une façon de procéder : ce n’est pas de proclamer In liberté d’association en ayant pour principal souci de la restreindre ; c’est de la donner pleine et entière, ne-proscrivant qu’une seule espèce d’association dont la dénomination se trouve dans un des chapitres du Code pénal, les associations de malfaiteurs, des hommes réunis dans un but subversif, contraire à l’ordre public ; autrement dire, c’est de ne s’en prendre qu’à l’objet même de l’association, de faire une loi répressive, avec laquelle

  1. Séance du Sénat du 28 février 1880.