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bibliothèque de Windsor et collection de M. Defer-Dumesnil) nous montrent comment il faut traiter les draperies, l’intelligence avec laquelle l’artiste commence par les disposer, la prodigieuse habileté dont témoigne son exécution, mélange de finesse et de largeur. La justesse absolue du modelé, la transparence des ombres les plus fortes et les passages délicats de ces ombres à la lumière attestent l’importance que le maître attachait aux moindres détails pour arriver à donner à ses œuvres toute la perfection possible. Fort de pareilles études, il attribuait aux draperies le vrai rôle qu’elles doivent remplir, celui de faire valoir les formes qu’elles voilent et d’ajouter aux figures agissantes leur propre animation et la vivacité charmante de leurs souples ondulations flottant autour d’elles.

Entre tous les animaux, le cheval est un de ceux que Léonard a le plus étudiés. Bon cavalier, il l’avait beaucoup pratiqué lui-même, et dans les représentations qu’il en a faites, il a su choisir les allures qui mettaient le mieux en lumière la beauté des proportions, la force ou l’élégance de l’animal, et décomposer les mouvemens de ces allures. Curieux d’ailleurs de toutes les manifestations de la vie, le maître ne manquait jamais, quand les occasions s’en offraient à lui, de dessiner les bêtes exotiques que, dans ce temps, les princes des cours italiennes, à Florence, à Mantoue, à Ferrare et à Milan, tenaient à honneur de réunir dans leurs ménageries. Mais les oiseaux surtout ont été pour Léonard l’objet d’études particulières. Il les aimait, et ses biographies racontent que c’était pour lui un très grand plaisir d’acheter des oiseaux captifs pour leur donner la liberté. Si touchant que soit ce trait, bien conforme d’ailleurs à la nature affectueuse du maître, peut-être quelque désir d’en tirer profit pour son instruction personnelle se mêlait-il à cet acte de générosité. La question du vol des oiseaux a été, en effet, une véritable obsession pour Léonard. A bien des reprises et durant toute sa vie, il y est revenu, remplissant de ses calculs et de ses observations de nombreuses pages de ses manuscrits, couvrant leurs marges de ses dessins. Il n’est guère de problème qui l’ait autant occupé que celui de la locomotion aérienne, et il s’y est appliqué de tout l’effort de sa science et de son art. Ce n’était pas seulement au point de vue spéculatif qu’il l’envisageait. La mécanique lui était chère et il y a laissé sa trace. Il considérait, en effet, « la science instrumentale ou bien machinale comme très noble