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et l’accompagna d’un magnifique présent offert par la colonie. Le cardinal répondit en anglais par un grand discours qui fut fort remarqué, parce qu’il y était fait une allusion directe au dogme de l’infaillibilité pontificale, dont il se déclara le partisan sincère et convaincu. « Il va repartir pour l’Angleterre, écrivais-je, où il fixera dorénavant sa résidence. Il est fort âgé et contraste de tous points, par la simplicité de son costume, son âge avancé et l’austérité de son visage, avec la taille imposante et le bel air du cardinal Howard. »

Cette promotion de cardinaux, tous choisis en dehors de la prélature romaine, presque tous étrangers à l’Italie, sauf le cardinal Alimonda et Mgr Pecci, ne pouvait manquer de produire une assez grande impression à Rome. On y remarqua nettement les deux choses que le Saint-Père s’était proposées en les faisant : composer le Sacré Collège d’hommes éminens, d’un mérite incontesté et reconnu par tous, et en éloigner le plus possible toutes les médiocrités qui tenteraient d’y pénétrer par de prétendus droits acquis. Puis après, fort de cet entourage cosmopolite qui ouvrait le Sacré Collège à une moitié de cardinaux étrangers, obliger l’Italie à compter davantage avec un pouvoir qui était si dignement représenté au dedans et au dehors, tel fut le but que le Saint-Père se proposa dans cette première promotion.

« Ces dispositions de Sa Sainteté, que manifestent ses derniers choix, écrivais-je à M. Waddington, et sa tendance à donner graduellement à l’étranger, une part prépondérante dans le Sacré Collège sont des événemens d’une certaine importance. En ce qui nous concerne, nous n’avons qu’à nous féliciter d’avoir assuré le maintien de nos intérêts permanens d’influence à Rome, par l’adjonction de deux nouveaux cardinaux. A quelque point de vue que l’on se place, il ne saurait, en effet, nous être indifférent d’être représentés avec plus de dignité auprès d’un pouvoir qui sera toujours, comme l’a dit avec raison M. Frère-Orban lui-même au Sénat belge, une grande puissance morale dans le monde. En ce qui concerne l’Italie, désormais c’est au dehors que le Saint-Siège placera son point d’appui, non pas qu’il se flatte d’obtenir pour le moment une assistance matérielle quelconque ; mais il sait que les Italiens compteront d’autant plus avec lui que l’étranger se montrera plus favorablement disposé. Une papauté, devenant de plus en plus italienne, ne serait plus qu’un évêché de Rome, à bref délai. Au contraire, un pontife