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Waddington, resterait le maître de la situation et ne serait pas débordé par le parti extrême. « Le Saint-Père, écrivais-je à M. Waddington, m’a confirmé ce que j’ai eu l’honneur de vous écrire souvent sur l’indifférence relative avec laquelle le Saint-Siège envisage aujourd’hui les modifications successives qui peuvent se produire dans le personnel gouvernemental des différens pays. — Il ne se préoccupe que des intérêts religieux dont il a la garde, et c’est dans cette limite que sont soigneusement réglées ses répulsions et ses préférences, mobiles comme ces intérêts eux-mêmes et trop hautes pour l’attacher à telle forme de gouvernement, ou pour la repousser en elle-même. La forme républicaine de nos institutions ne sera donc pas pour le Saint-Siège un motif d’éloignement envers la France, aussi longtemps que les intérêts religieux seront sauvegardés dans leur ensemble. »

Le Saint-Père avait, par suite, été bien aise d’apprendre que le nonce fût entré immédiatement en rapports avec le nouveau Président et que le cardinal Guibert se fût empressé de faire visite à M. Grévy. Son Eminence avait rendu compte au Saint-Père de cet entretien dont il a bien voulu me citer les points principaux et qui l’avaient généralement satisfait. Le Pape y puisait la confiance que le gouvernement de la République continuerait à se maintenir dans une voie d’entente avec le Saint-Siège, et il ne voyait dès lors que des motifs d’encourager l’épiscopat français à ne troubler, par aucun désaccord, cette note générale de bonne harmonie. Le Saint-Père daigna aussi, à deux reprises, me remercier des efforts que je faisais pour maintenir la bonne entente entre la France et le Saint-Siège et m’en exprima toute sa satisfaction. Je lui répondis que tous mes efforts étaient acquis à ce programme d’apaisement, qui me paraissait être aussi bien dans la pensée du gouvernement qu’il l’était dans mes intentions personnelles.

Le jour où j’avais l’honneur de voir le Saint-Père étant le lendemain du premier anniversaire de son pontificat, je profitai de cette occasion pour résumer devant Sa Sainteté les résultats déjà importans que la politique modérée suivie par le Saint-Siège avait obtenus depuis un an.

Le Saint-Père écouta sans contradiction, et j’oserai dire avec complaisance, ces paroles qui me parurent correspondre à sa pensée intime. Puis, il me parla de la députation des journalistes catholiques qu’il devait recevoir le surlendemain. « C’est une