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d’alimentation exige l’artifice d’un supplément de sel ? Les chimistes ont cherché dans la différence de composition des deux catégories d’alimens la raison de cette particularité. Si les uns et les autres contiennent des quantités également faibles de chlorure de sodium, il y a un autre produit minéral qu’ils renferment à un degré inégal, quoique élevé, et par lequel ils peuvent se différencier. Il s’agit de la potasse. Par opposition au précédent, celui-ci, toujours abondant, subit, de plus, d’un aliment à l’autre des variations très étendues quant à sa quantité relative. Il y a des alimens qui en contiennent, beaucoup, et ce sont précisément ceux qui sont empruntés au règne végétal. Les plantes se distinguent habituellement par leur richesse en sels potassiques. Elles en accumulent d’énormes quantités qu’elles arrachent aux sols les plus pauvres. Si bien qu’avant la découverte des mines de Stassfurt, l’incinération des plantes vertes était la source unique de la potasse industrielle. Il y a, inversement, d’autres alimens qui sont relativement pauvres en cette sorte de composés, et ce sont, en général, les substances empruntées aux animaux. De telle sorte qu’en définitive la différence capitale, — nous ne disons pas : la seule, — qui distingue aux yeux du chimiste les deux modes d’alimentation, réside ; dans l’abondance en potasse de la ration végétarienne, opposée à la pénurie de la ration carnée.

Si l’on fait une liste des alimens, rangés d’après la quantité croissante de potasse qu’ils contiennent, on verra que les substances animales (sang, lait, viande) viennent en tête, tandis que les derniers rangs sont occupés par les végétaux (haricots, fraises, pommes de terre et trèfle). Cependant, il y a quelques interversions remarquables. Le riz, par exemple, est extrêmement pauvre en potasse : un kilo de riz, à l’État sec, ne fournit qu’un gramme de potasse : il est vrai qu’il fournit encore bien moins de soude (trente-trois fois moins) ; par ces traits, le régime du riz se rapproche du régime animal ; et, en effet, il ne provoque qu’à un faible degré l’appétence du sel. Tout au contraire, un kilogramme de pommes de terre contient 24 grammes de potasse et soixante fois moins de soude : cet aliment réalise, à ce point de vue, le type végétarien dans sa perfection.

Los enseignemens que donne l’analyse chimique se résument, en définitive, dans cette formule : le régime végétal livre à l’économie beaucoup de potasse et très peu de soude ; — environ, de