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canaux, les plaines et les bois leur ont livré tous les secrets de leur transparence, de leur atmosphère, de la légèreté et de l’inconstance du ciel, de la fraîcheur de leurs eaux, du crépuscule de leurs ombres, on ne se lassera pas de l’admirer dans les délicieux paysages qui abondent parmi ces superbes héliogravures et eaux-fortes que commentent des écrivains de talent, souvent peintres eux-mêmes.

Aucun art plus que l’art grec n’a glorifié la beauté de la femme[1], élevé plus de monumens de son enthousiasme, ni perpétué, dans de plus admirables modèles la perfection de la forme, jointe à la grâce pleine de noblesse, qui distinguèrent les Athéniennes du temps de Périclès, celles qui devaient faire triompher la beauté et devinrent l’objet d’un culte qui ne s’est point perdu. La sculpture et la peinture d’Athènes, de Corinthe, des Iles, nous offrent donc les types les plus poétiques de la femme grecque, qui contribue à en affiner la forme et adoucir le style trop âpre au début, et, si l’art hellénique est parvenu à cette harmonieuse fusion de la grâce avec la force, c’est à elle qu’il le doit. M. Notor, qui est à la fois écrivain, archéologue et artiste, s’inspirant des documens mêmes de l’antiquité grecque, a emprunté aux musées et galeries particulières de Londres, Rome, Florence, Naples, Vienne, Munich des motifs habituels aux peintures des vases grecs, qui sont comme autant de petits tableaux de la vie antique. Il a réussi à nous montrer la femme grecque avec tout son naturel, dans son milieu, dans le gynécée.

Il a fait revivre aux yeux des scènes délicieuses dans leur familiarité : la jeune fille qui balance Eros sur son pied, le jeu de la bascule, la partie d’osselets, le jeu de la morra, la Danse de la Grue. Les deux cents illustrations documentaires de ce volume, qui offre en quelque sorte une reconstitution plastique de toute une époque, sont autant de tableaux gracieux et charmans, à travers lesquels passe comme un souffle de poésie antique, et qui nous font voir, sous la précision et la vigueur de gravures au burin, une Grèce rajeunie qui, loin de l’austérité classique, apparaît fraîche et prime-sautière, quoique toujours parée de son éternelle beauté.

Le plus beau modèle de l’œuvre d’art, la plus jolie parure de la femme, n’est-ce pas dans la nature qu’il se trouve, dans la fleur, « bijou naturel, parfum impondérable, rêve supra-humain ? » On ne saurait imaginer sur ce sujet de livre à la fois plus savant, et plus magnifique que ce livre qui vient de lui être consacré : les Fleurs à travers

  1. La Femme dans l’Antiquité grecque, texte et dessins de M. G. Notor, 1 vol. in-4o, avec 33 reproductions en couleur et 300 dessins dans le texte : H. Laurens.