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diplomatique française antérieure aux conventions de délimitation et de commerce du 20 juin 1895[1] et les négociations relatives à la délimitation des territoires cédés à bail par la Chine à la France à Kouang-Tchéou-Ouan[2], en font foi. Enfin les traités anglo-chinois de Nankin, de Tien-tsin et de Pékin contenaient certaines dispositions favorables à la Chine, et la cour de Pékin s’en prévalut elle-même pour protester à Londres contre les entraves apportées par les colonies australiennes à la liberté de l’émigration[3].

La France exerce en Chine, en vertu de ses conventions avec la Chine, un protectorat religieux. Elle s’est chargée de défendre, avec l’assentiment unanime des peuples civilisés (tout au moins jusqu’à l’établissement du protectorat allemand sur les missions du Chan-toung méridional) et de l’aveu du Saint-Siège, les intérêts des missionnaires catholiques et le libre exercice de la religion chrétienne sur tout le territoire de l’Empire. Dès 1857, le Prince de Joinville félicitait, dans cette Revue, notre plénipotentiaire de n’avoir pas manqué l’occasion d’élever la voix, dans les négociations antérieures et postérieures au traité de Whampoa, en faveur de ces missionnaires et de nos coreligionnaires indigènes. Ce rôle nous fut encore plus nettement imparti par les traités de 1858 et de 1860, dont j’ai signalé l’importance décisive.

La France s’acquitta de ce devoir international avec une remarquable persévérance, par exemple en février 1865, en obtenant pour ses missionnaires la liberté d’acheter des terrains et des maisons dans l’intérieur du pays, le vendeur étant seulement astreint à spécifier dans la rédaction de l’acte que sa propriété avait été aliénée pour faire partie des biens collectifs de telle ou telle mission catholique[4] et, dans les derniers jours

  1. Archives diplomatiques, 1898, p. 302 à 341.
  2. Archives diplomatiques, 1899, p. 211 et suiv.
  3. L’empire chinois éprouva de ce côté, nous devons le reconnaître, un mécompte auquel il ne devait pas s’attendre. Les colonies australiennes et le Canada prirent, à partir de 1877, diverses mesures restrictives de l’émigration chinoise. Le 21 décembre 1887, l’ambassadeur de Chine à Londres remit à lord Salisbury une note qui résumait les griefs de son gouvernement : cette note fut transmise aux gouvernemens coloniaux, qui l’accueillirent de la façon la plus impertinente. Lord Derby dut faire à la Chambre haute, le 9 juin 1888, cet humble aveu : « Nous sommes à la merci des colons ; il faudra qu’ils en arrivent à leurs fins. » Voyez, sur le projet de traité anglo-américain restrictif de l’émigration chinoise (Washington, 1888), dans la Revue du 1er avril 1889, l’article de M. Max Leclerc.
  4. C’est précisément cette convention dont le texte avait été dénaturé par un règlement d’administration intérieure et fut rétabli, après de longs pourparlers, en 1895.