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organes supérieurs de l’humanité, » la « période de l’effacement total de la foi. » La réflexion s’est substituée à la croyance. Des deux mouvemens qui se sont produits ensemble à la fin du moyen âge, le protestantisme et l’humanisme, le second a profité du travail de démolition qu’avait accompli le premier. Et les hommes, faute d’avoir désormais dans la religion le sûr et parfait appui que leurs pères avaient trouvé en elle, se sont de plus en plus adressés à la science, espérant obtenir d’elle cet appui dont ils étaient privés. Mais la science n’a rien pu faire pour eux, sauf d’agrandir encore le vide de leurs cœurs. « Une forme de pensée s’est produite qui s’est arrogé le nom de philosophie, et qui a eu pour unique programme d’aller à l’encontre de toutes choses anciennes, mais particulièrement de la religion. La haine dirigée d’abord contre l’Église catholique s’est transformée en haine de la Bible, puis en haine de l’esprit chrétien tout entier. Et cette haine ne s’en est point tenue là. D’un mouvement naturel et inévitable, elle s’est attaquée aussi à tous les objets de l’enthousiasme, à l’émotion et à la fantaisie, à la moralité et au goût du beau. Elle a rabaissé l’homme dans l’échelle des êtres. Elle a changé l’infinie musique créatrice qu’était, autrefois, la vie universelle, dans le monotone battement d’une roue de moulin immense et inutile, d’une roue de moulin en soi, qui tourne à vide et sans meunier. »

Cependant l’enthousiasme est trop naturel, au fond du cœur de l’homme, pour se laisser déraciner aussi aisément. Et l’enthousiasme a fini par se pervertir : il s’est dirigé contre lui-même. « Des artistes se sont trouvés pour arracher fiévreusement à la nature, au sol, à l’âme humaine, aux sciences, toute trace de beauté, de sainteté et de poésie ; pour salir de sarcasmes tout ce qui élève, l’homme et l’univers. Et ils ont donné à cette œuvre de destruction le nom de diffusion des lumières. » Mais « l’anarchie où ils ont plongé l’esprit humain présage le prompt avènement d’une renaissance de la religion. Devant les ruines de toute notion positive l’homme va, naturellement, relever la tête vers le ciel. L’esprit de Dieu va recommencer à planer sur les eaux. »

Et toute la fin de l’article est employée à démontrer l’imminence, comme aussi la nécessité, de ce retour de l’Europe à l’esprit chrétien. Seul cet esprit pourra mettre fin à la guerre, qui épouvante les peuples, et contre laquelle tous les autres remèdes seront toujours impuissans. « Le sang continuera à couler sur