Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 162.djvu/372

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Par rapport à l’exercice 1874, les principales augmentations suivantes apparaissent au premier coup d’œil :

A la Dette publique : 276 millions ; — aux Pouvoirs publics : 4 millions ; — aux frais de régie et ressources spéciales : 231 millions ; — aux dépenses militaires et coloniales : 499 millions ; — aux autres ministères, 340 millions.

D’autre part, l’Amortissement est diminué de 181 millions.

Examinons de plus près certains de ces élémens.

D’abord la Dette publique. C’est le plus gros chapitre de notre budget. Le projet du ministre des finances pour 1900 en contient un tableau intéressant, mais prodigieusement incomplet. Il y manque un des personnages de la trinité du grand-livre : la Dette viagère. La suppression de ce personnage gênant permet en effet de dissimuler l’incroyable augmentation de notre Dette totale. L’ingénieux M. Caillaux a même systématisé dogmatiquement son innovation. Jusqu’à lui, tous les ministres avaient naïvement tenu la Dette viagère pour une Dette. Il ne reste à ses yeux que l’épithète ; le substantif s’évanouit. Ce que l’État « doit » n’est pas une « dette. » S’il paye ses créanciers, les propriétaires des pensions inscrites au grand-livre, c’est par faveur, par libéralité grande. Pour M. Caillaux, la Dette viagère n’est qu’un accessoire des frais de régie ou des services généraux des ministères ! Il oublie simplement que, s’il en était ainsi, le Parlement aurait le droit de diminuer à son gré la Dette viagère, comme il a le droit de diminuer les traitemens des fonctionnaires et même de les supprimer.

Conservons donc bourgeoisement à la Dette viagère le caractère qui lui appartient nécessairement depuis qu’elle existe et lui appartiendra jusqu’à l’incendie du grand-livre, et maintenons-la dans le chapitre de la Dette publique où elle figure depuis le fameux rapport présenté par Cambon, le 17 avril 1792, à l’Assemblée législative. Nous aurons par elle une des principales explications de l’accroissement énorme de notre Dette, après tant de promesses d’en alléger le fardeau.

En 1874, les charges annuelles de la Dette se décomposaient ainsi :


Millions
Dette consolidée 744
Dette remboursable 309
Dette viagère 108
Total 1 161