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En parlant de souveraineté du peuple sans la comprendre, on n’eut souci que de la souveraineté de la Chambre des députés. Chateaubriand seul aperçut et signala, dans son langage hautain, les conséquences logiques, inévitables, des principes qu’on proclamait. Elles vinrent à leur heure, en 1848, en 1851 ; elles sont en voie, aujourd’hui, de se réaliser pleinement, au plus grand préjudice de la liberté, de ces « droits de l’homme » qui furent la raison d’être de la révolution de 1789 et qui ne tarderont pas à se trouver aussi méconnus par la tyrannie législative qu’ils le furent par la monarchie absolue. Elles se montrent avec plus de force encore en finances qu’en politique. On n’a qu’à lire les chiffres des budgets pour les apercevoir.

Le premier budget de Louis-Philippe, celui de 1830, dépassa 1 095 millions de dépenses, soit 81 millions de plus qu’en 1829 ; la plus forte partie de cette augmentation fut déterminée surtout, d’ailleurs, par l’expédition d’Alger, ordonnée et commencée par Charles X. Les dépenses militaires de 1829 n’avaient été que de 287 millions ; celles de 1830 atteignirent 324 millions, qui devaient être dépassés notablement l’année suivante. Elles furent en effet de 458 millions en 1831, pour redescendre ensuite, d’année en année, jusqu’à 287 millions en 1836. Le budget des dépenses de cette année 1836 peut être pris comme type de l’administration financière de la monarchie de Juillet pendant ses premières années. Il se présente ainsi dans ses grandes lignes : dépenses totales, 1 065 millions ainsi répartis en chiffres ronds :


Francs
Dette publique 331 485 000
Dotations 16 744 000
Frais de régie, remboursemens, etc 168 000 000
Dépenses militaires 287 000 000
Dépenses des autres services 262 000 000

Les choses ne sont pas très différentes de ce qu’elles étaient en 1829. La dette consolidée est à 192 millions au lieu de 200 ; la dette viagère à 65 millions au lieu de 64 ; la dette remboursable, à 28 millions au lieu de 23 ; si le service total de la dette s’élève à 331 millions (au lieu de 328 en 1829), c’est qu’il faut ajouter aux chiffres ci-dessus 45 millions pour la dotation de l’amortissement au lieu de 40 en 1829. Les dépenses royales ont diminué : le roi-citoyen et sa famille ne coûtent que 13 millions au lieu de 32 en 1829 ; la Chambre des pairs ne coûte que