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qui s’écoulèrent du 1er mars au 22 juin dominent tellement l’année 1815 qu’ils l’emportent de beaucoup, en force déterminante, sur les huit mois pendant lesquels régna Louis XVIII ; si bien que les budgets de 1814 et de 1815 furent ce qu’ils furent à cause de Napoléon bien plus qu’à cause de Louis XVIII. Je ne compte donc l’administration financière de la Restauration qu’à partir de l’exercice 1816 inclusivement jusqu’à la fin de l’exercice 1829, l’année 1830 devant être impliquée dans les comptes du gouvernement de Juillet, parce qu’elle fut dominée par la révolution des « trois glorieuses. »

C’est ainsi une période de quatorze exercices budgétaires qui forme le lot financier exclusif de la Restauration, incontestablement remarquable par l’ordre et l’esprit d’économie de son administration, puisqu’elle est le seul gouvernement dont les budgets, pris ensemble, se règlent par un excédent de recettes. Les recettes totales, ordinaires et extraordinaires, de 1816 à 1829 inclusivement, s’élèvent en effet à 14 474 762 138 francs et les dépenses totales à 14 427 673 706 francs, d’où un excédent de recettes de 47 088 432 francs. Il n’en serait pas de même si l’on comptait à part les recettes ordinaires et les dépenses ordinaires.

Le budget de 1816 fut présenté à la Chambre des députés, le 23 décembre 1815, par le ministre des Finances comte Corvetto, et par M. Dudon, conseiller d’Etat, qui furent un exposé des motifs complet, suivant la coutume d’alors bien préférable à celle d’aujourd’hui consistant à remettre silencieusement le budget sur le bureau de la Chambre, sauf à en parler six mois plus tard. D’après, le projet, les dépenses devaient atteindre exactement 800 millions, équilibrés par une somme identique de recettes. Dans les dépenses figuraient notamment : la dette, pour 115 millions ; la liste civile du roi, pour 25 millions, et les dotations de la famille royale, pour 8 millions ; la Chambre des Pairs, pour 2 millions ; la Chambre des Députés (mandat gratuit), pour 700 000 francs ; la Guerre, pour 180 millions ; la contribution de guerre due aux alliés, pour 140 millions ; l’entretien de leurs troupes, pour 130 millions ; la Marine, pour 48 millions ; les Affaires étrangères, pour 6 millions et demi, etc.

La discussion qui précéda le vote de la loi de finances fut marquée par un débat qu’il faut signaler parce qu’on pourrait l’appeler prophétique. Tout le secret des finances publiques y fut révélé. C’est le débat relatif au droit d’initiative des Chambres.