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REVUES ÉTRANGÈRES



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À PROPOS DE LA MORT DE NIETZSCHE


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Friedrich Nietzsche, par le professeur Th. Ziegler, 1 vol. in-18, Berlin, 1900 ; — Correspondance de Nietzsche et de Heinrich von Stein, par Mme  Fœrster-Nietzsche, dans la Neue Deutsche Rundschau de juillet 1900, etc.

Le malheureux Nietzsche a achevé de mourir. Depuis douze ans déjà sa raison s’était effondrée, et nulle trace ne subsistait plus d’une intelligence qui avait été naguère infiniment active, variée, et brillante : mais le corps s’obstinait à vivre. Une congestion l’a enfin terrassé, le 25 août dernier, dans la maison de Weimar qui lui servait d’abri en même temps qu’elle servait de siège aux Archives Nietzschéennes, fondées, comme l’on sait, pour répandre par le monde la gloire de son nom.

J’ai appris la nouvelle de cette mort le lendemain matin, par un journal, dans un wagon bavarois où j’avais pour compagnons de voyage cinq étudians de l’université de Würzbourg. Mes jeunes voisins s’entretenaient de leurs professeurs ; ils lisaient et discutaient le programme d’un congrès médical qui allait s’ouvrir quelque part, la semaine d’après : et comme ils avaient, avec cela, des physionomies très ouvertes et très éveillées, je pensai que la mort de Nietzsche ne manquerait pas de les émouvoir au moins autant qu’elle m’avait ému. Je me permis donc de tendre à l’un d’eux le journal que je venais de lire, en lui désignant du doigt la dépêche de Weimar. Le jeune homme me remercia, lut la dépêche, la relut tout haut à ses camarades : mais