Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 161.djvu/697

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ces oiseaux de lisière sont donc surtout des goélands, des cormorans et des pétrels. Le plus intéressant de ces hôtes ailés du détroit antarctique est le goéland dominicain. C’est un grand oiseau blanc dont les ailes et une partie du des présentent une teinte brun foncé, tandis que le bec et les pattes sont jaunes. Il a des habitudes alimentaires singulières. Il se nourrit de mollusques et particulièrement de ces petits coquillages bien connus, en forme d’entonnoir surbaissé, que l’on rencontre là, comme partout, appliqués à la surface des rochers et que l’on nomme des patelles. Seulement il ne les consomme point sur place ; après les avoir cueillis, il va les dévorer, un à un, à son aise, sur quelque rocher élevé où il abandonne la coquille. Et comme il y a beaucoup de goélands qui, dans les mêmes parages, ont répété pendant beaucoup d’années le même manège, il en résulte que ces amas de coquilles, accumulés pendant des siècles, cimentés ultérieurement par la vase et le sable qui proviennent de la désagrégation des rochers, peuvent simuler des assises régulières. Ces dépôts étant placés bien au-dessus des amas de même nature qui se forment actuellement plus bas sur le rivage, on pourrait croire, à première vue, que le niveau de la mer s’est abaissé et conclure à un exhaussement des côtes. Un géologue insuffisamment informé de ce trait de mœurs, pourrait être induit en erreur.


Il y a enfin, dans cette catégorie d’oiseaux qui vivent à la lisière extérieure de la banquise, une espèce remarquable et d’ailleurs caractéristique des régions antarctiques. C’est le Bec-en-Fourreau (Chionis Alba). Il avait été découvert par l’expédition de Cook, en 1774 : M. Racovitza l’a retrouvé dans le détroit de Gerlache, en 1898. Des excroissances bizarres qui engainent ses mandibules lui ont valu le nom qu’il porte. Mais la particularité qui le signale davantage à l’attention des zoologistes, c’est que ses pattes ne sont point garnies d’une palmure. C’est le seul, parmi toute la gent emplumée qui anime le triste paysage antarctique, qui ne soit pas un véritable palmipède.


IX

La classe la plus élevée du règne animal, celle des mammifères, a aussi ses représentans à la surface de la banquise polaire, tant au nord qu’au sud. Sur la couverture glacée de l’océan