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Vladislav se confondaient avec ceux du tsar assassiné. Basile dut même protéger Marie contre les ongles des filles de ce dernier. Celui que l’admiration ou la terreur des peuples avait déjà surnommé Balgaroctone, « le Tueur de Bulgares, » n’interrompit point, pour de si futiles incidens, sa tournée impériale à travers le pays conquis, faisant ses entrées triomphales dans les métropoles tsariennes des Bulgares, trônant dans leurs palais, garnissant de ses soldats leurs citadelles, de colons grecs ou arméniens leurs campagnes, encaissant leurs trésors. Dans la presqu’île et les îlots où s’élevait la cité royale de Prespa, il bâtit deux forteresses, dont l’une s’appela Basilida et dont l’autre a laissé des ruines désignées sous le nom slave de Grad (la Ville).

Outre le parti de la soumission, il y avait celui de la résistance. Il était surtout composé des boïars de la montagne, des chefs de clan bulgares, serbes ou albanais. Deux d’entre eux, en leurs nids d’aigle perchés sur les cimes inaccessibles, arrêtèrent longtemps les légions : Frujine, sur le Tomor, près de Bérat, à 2 600 mètres d’altitude ; Ivatch ou Ibatzès, sur le Vrokhotos. Le premier, réduit par la famine, dut capituler : Basile le reçut à merci et le nomma capitaine dans sa garde. L’autre, après avoir fait une soumission nominale, se révolta de nouveau. Un hardi partisan, à la faveur des fêtes de l’Assomption, pénétra jusqu’à son aire, l’enleva presque au milieu des siens, lui creva les yeux et, faisant de son corps un rempart contre les flèches, vint le déposer vivant aux pieds de l’empereur. Basile, jugeant Ivatch indigne de clémence, l’enferma dans un cachot. Un troisième, Nikolitsès, tour à tour traître au tsar et au Basileus, tour à tour pris ou évadé, essayait de perpétuer, comme chef d’une bande de haïdouks, un royaume errant de Bulgarie. Lui aussi finit par apporter sa soumission ; mais Basile, irrité de ses multiples trahisons, lui accorda seulement l’hospitalité d’une prison.

Basile, par les garnisons placées dans les forteresses, par les colonies grecques ou asiatiques implantées dans le pays, établit son pouvoir dans ces réfractaires montagnes avec une solidité que n’avait obtenue avant lui aucun de ses prédécesseurs chrétiens, qu’après lui n’obtinrent jamais les sultans de Stamboul.

La tournée impériale, domptant les superbes, relevant la race grecque si longtemps opprimée, se poursuivit à travers la Thessalie, la Phocide, la Locride, la Béotie, l’Attique. Ce qui semble donner son vrai caractère à cette guerre de cinquante ans