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sont les grands coupables de la perturbation à laquelle le Céleste Empire est en proie, et que, sans eux, les bons rapports n’auraient jamais été troublés entre l’Asie et l’Europe, il a engagé le gouvernement à chasser les missionnaires de toutes nos colonies, en attendant qu’on chasse les congréganistes de la métropole. M. Homais est éternel !


Les Conseils départementaux ont traduit un sentiment général dans le pays. Tout le monde y attendait avec une impatience de plus en plus vive des nouvelles de notre petit corps expéditionnaire, et on s’étonnait depuis quelques jours de ne pas en avoir davantage. Enfin le silence qui pesait sur lui a été rompu, et nous pouvons maintenant nous rendre compte de la part qu’il a prise à l’œuvre commune. Dans les premiers télégrammes arrivés en Europe, elle avait été singulièrement amoindrie. Ce n’est même pas assez dire, car ces télégrammes ne faisaient aucune mention de l’arrivée du contingent français à Pékin. Nous ne rechercherons pas s’il y avait là une omission intentionnelle : chacun est libre d’en penser ce qu’il voudra. Mais certainement les Anglais ont abusé de leur mainmise sur le télégraphe pour chanter les exploits des uns et négliger ceux des autres : il va sans dire qu’ils n’ont pas oublié les leurs. Nous n’irons pas jusqu’à leur en faire un grief formel, et, si nous le faisions, ce ne serait pas sans exception ni réserves. Le plus important de leurs hommes de guerre en Extrême-Orient, l’amiral Seymour, a en effet écrit à l’amiral Courrejolles, le distingué commandant de nos forces navales, une lettre pleine d’effusion cordiale qui fait également honneur à celui qui l’a écrite et à ceux qui l’ont inspirée. Il est impossible de mieux rendre justice à nos marins que ne le fait l’amiral Seymour. Sa lettre est d’autant plus significative qu’on la sent écrite au courant de la plume, sans la moindre préoccupation littéraire, sans aucun souci des négligences de style qui peuvent s’y présenter : c’est l’œuvre d’un soldat adressée à un autre soldat. L’amiral anglais s’y montre rempli d’estime pour le courage et l’endurance de nos marins, aussi bien que de reconnaissance pour l’appui qu’il a trouvé auprès d’eux. Il exprime l’espoir que cette confraternité d’armes, où l’on apprend mutuellement à se connaître et à s’aimer, resserrera les liens des deux pays. C’est un désir que nous formons comme lui. Rien, au surplus, ne rapproche plus les hommes que des dangers courus en commun, si ce n’est peut-être l’expression publique des sentimens de Confiance mutuelle qu’ils ont rapportés de cette épreuve.