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Tout cela s’éloigne, et là-bas, du côté de la digue, du côté des paquebots, une grande clameur confuse...

C’est passé, c’est fini... On se regarde, on sourit un peu, lassé, énervé. Point de réflexions. A quoi bon ?

Et tandis que l’officier de manœuvre commande le toujours bien venu : « Faites rompre ! », nous descendons jouer un rams, un pauvre rams pour nous détendre.

Mais non, ce n’est pas fini ! Il y a encore la fête de nuit, la fête vénitienne... Oh ! grâce, grâce !... On a écrit ça partout, n’est-ce pas ? On vous a dit la longue théorie des lanternes, des lampions, des « sujets : » la galerie, le bateau de fleurs, — musique, chants, — le cygne, le crocodile que d’aucuns... oh ! grâce encore !... ont appelé caïman. Et il paraît que cela faisait rire...

Il est minuit. La brise s’est levée ; la nuit noircit, humide... La théorie se disloque ; avec les étoiles, les lampions s’éteignent : on ne reconnaît plus les ailes du cygne, ni la mâchoire du crocodile.

Rompus, fourbus, enroués de chants et de cris, les nageurs accostent péniblement. Allons !... « Tout le monde à se coucher ! » — Oh ! oui, c’est cela, allons nous coucher.


20 juillet.

Il est 9 heures du matin. Je prends le quart. Le timonier me remet le cahier de service, et je lis : « Service ordinaire du vendredi. » Oh ! la bonne parole, parole de paix et de sérénité : plus de fêtes, plus de cérémonies, plus d’inspections générales ! Le service ordinaire, tout simplement ordinaire...

Ordinaire, c’est bientôt dit ; ne croyez pas cependant que le calme absolu succède brusquement à tant d’agitations. Après le coup de vent, il y a encore de la houle...

Et d’abord il faut liquider la situation des gardes-côtes. Détachés de l’escadre du Midi, rattachés à celle du Nord, ils vont reprendre, avec leur mission particulière d’instructeurs d’apprentis marins, un effectif de « permanens » très réduit.

De L..., le stratégiste, n’en croit pas ses oreilles quand on lui annonce ce « mouvement. »

« Et qui donc, s’écrie-t-il, nous parlait d’un soi-disant intérêt militaire à nous laisser ici, dans ce... de poste d’avant-garde ? Que ferions-nous avec des équipages ainsi composés ? S’est-on jamais avisé de diminuer les effectifs des régimens de l’Est ? Non, certes,