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faites ? Les pointeurs qui, dès le début, vous donnent la supériorité du feu que vous ne perdrez plus !

— Hé ! justement... Les qualités essentielles du bon pointeur ne sont-elles pas, avec une vue parfaite, le calme, le sang-froid, la confiance en soi-même, c’est-à-dire la force morale ? ... »

Pour en revenir à nos évolutions, on a essayé plusieurs formations d’armée par escadre. Quelle était la meilleure ? Je n’en sais rien ; cela dépendrait des circonstances. Je ne retiens que trois observations :

En premier lieu, la vitesse réduite à laquelle nous condamne la faiblesse de l’approvisionnement de charbon de quelques unités diminue les difficultés de manœuvre et les chances d’accident, mais aussi l’intérêt des évolutions. Au combat, on commencerait avec des vitesses déjà supérieures, qui, peu à peu, s’augmenteraient encore.

Pour former complètement le coup d’œil et les nerfs des capitaines, il faudrait évoluer, au moins quelquefois, à 13, 14, peut-être 15 nœuds.

En second lieu, si l’on attachait tant de prix aux évolutions, à la belle ordonnance des escadres, à la précision mathématique des mouvemens « tous à la fois, » pourquoi n’avoir pas créé des groupes parfaitement homogènes ? Au contraire, nulle flotte où la fantaisie individuelle se soit donné plus librement carrière que dans la nôtre. De là, pour le service d’escadre, de graves inconvéniens dans l’emploi rationnel des appareils moteurs, qui s’usent vite à ce jeu perpétuel de brusques augmentations, de brusques diminutions de vitesse. Et le défaut n’est pas moins sensible au point de vue purement militaire : on voit remplir le même rôle, occuper le même poste dans les formations, à des bâtimens dont les facultés sont très diverses, dont le rayon de gyration, la disposition de l’armement offensif et défensif, diffèrent essentiellement. En bonne tactique, cela est fâcheux.

Enfin, — c’est ma troisième observation, — les choses se passent bien tout de même. On sait manœuvrer chez nous.


« Après tout, dit le capitaine de frégate, à qui arrivait ce matin l’écho de notre discussion, qu’est-ce donc que la tactique navale, si ce n’est la science des évolutions ? »

De L..., qui s’entend à ces questions et connaît bien son histoire maritime, répond tout de suite par des exemples :