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mourant à Paris. Il y resta six semaines au lit et deux mois en convalescence.

Sur sa demande, Fain lui avait été adjoint comme archiviste du Cabinet. Bien que sa tâche journalière se trouvât ainsi un peu allégée, il était trop affaibli pour reprendre son service quand l’Empereur partit pour Erfurt en avril 1813. Napoléon dut se résigner à se séparer de lui, non sans chagrin, car il avait pour « son Menevallot », comme il l’appelait familièrement, une sincère affection. A Essling, étant monté sur un moulin pour observer l’ennemi, il vit Meneval, qui se trouvait près de là, tomber soudain par terre. Il descendit en hâte, le fit relever, et, s’apercevant que ce qu’il croyait une blessure d’arme à feu n’était qu’un coup de pied de cheval, il lui dit : « — Allez-vous-en bien vite. Vous m’avez fait une grande peur. » A Sainte-Hélène, il parlait souvent de lui : «Joseph, disait-il, m’avait donné en Meneval un véritable trésor. Il était doux, réservé, zélé, fort secret, travaillant en tout temps et à toute heure. Il ne m’a jamais donné que satisfaction et agrément, et je l’ai fort aimé... J’ai failli le tuer à force de travail, et j’ai dû le mettre en convalescence auprès de Marie-Louise, chez laquelle son emploi n’était plus qu’un canonicat. »

Ce canonicat était la charge de Secrétaire des commandemens de l’Impératrice et Reine. Meneval y conserva les appointemens de Secrétaire du Portefeuille, soit 24 000 francs. L’Empereur lui avait donné en outre une dotation annuelle de 30 000 francs, un cadeau de noce de 50 000 francs, la qualité et le traitement de maître des requêtes au Conseil d’État ; il l’avait fait chevalier de la Couronne de Fer, officier de la Légion d’honneur et baron de l’Empire. Il l’inscrivit pour 100 000 francs sur son testament. Comme disaient les soldats : « Si le tondu fait tuer les gens, il sait aussi les récompenser. »


III

En 1814, Meneval se fit un point d’honneur de ne point quitter Marie-Louise. De Blois, il l’accompagna à Vienne, puis à Aix, d’où il revint avec elle à Schonbrunn. Dès les premiers jours, il avait pressenti les desseins de la cour de Vienne. « L’Impératrice, écrivait-il en passant à Bâle, le 3 mai, se porte assez bien et soutient sa position avec plus de calme qu’elle n’en aurait, je crois,