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les conditions actuelles et « sans les golfes d’Arta et de Volo avec les territoires adjacens ; « que cette annexion serait à l’avantage réciproque du royaume agrandi et de l’empire ottoman, délivré d’une cause d’agitations et de conflits. Sans doute, il n’entendait pas demander à la Porte « des sacrifices impossibles, » non plus que satisfaire « les aspirations excessives » de l’hellénisme, mais il regardait comme utile de tracer une ligne générale qui indiquerait « la mesure des intentions des Puissances » et servirait de base aux pourparlers ultérieurs auxquels les deux États seraient conviés. Cette ligne suivrait « la vallée du Salamyrias (ancien Pénée) sur le versant de l’Egée, et celle du Calamas du côté de la mer Ionienne. » M. Waddington s’abstint de parler de la Crète et termina sa harangue en disant que, « pour faciliter le succès des négociations, les Puissances étaient prêtes à offrir leur médiation directe aux parties intéressées. »

Les plénipotentiaires d’Italie et d’Autriche donnèrent aussitôt à ce projet leur entier assentiment. Lord Beaconsfield, tout en considérant que le tracé était « discutable, » promit son adhésion complète « au vote unanime des Cours. » Il éloigna la pensée de mesures coercitives, » mais s’attacha longuement à démontrer que la frontière présente était « un péril et un désastre, » qu’en la modifiant, on n’avait point pour but « de partager un État vieilli » mais, au contraire, de prévenir des troubles, et de « fortifier l’empire ottoman. » Il exprima dans la péroraison de ce discours, prononcé, contre l’usage, en langue anglaise, « l’espoir et même la conviction » que le Sultan accueillerait « une conclusion équitable. » Le prince Gortchakof, envisageant les argumens de la France et de l’Angleterre comme inspirés « par la même idée mère, » accepta notre projet. Le chancelier allemand n’éleva aucune objection.

Carathéodory-Pacha présenta seul, au nom de son gouvernement, des considérations contraires. Il le fit avec beaucoup d’énergie et de dignité, en donnant lecture d’une note préparée en apparence pour répondre aux allégations des délégués hellènes, mais qui, par le fait, combattait en même temps l’argumentation des précédons orateurs. Il affirma que les agitations antérieures dont la Porte déclinait la responsabilité ne devaient pas être attribuées à la constitution géographique et politique des provinces limitrophes, et qu’au surplus les réclamations du Cabinet d’Athènes étaient étrangères à l’objet de la réunion européenne.