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Mais le Sénat, à qui l’auteur reproche d’être « le seigneur du Président, » n’a-t-il pas pour président le Vice-Président des États-Unis ? Que fait ce membre du pouvoir exécutif à la tête du plus haut organe du corps législatif ?


Il ne serait pas convenable, sans doute, dit l’auteur, de ne pas dire un mot du président du Sénat dans une étude sur le Sénat ; et cependant il y a très peu de chose à dire du Vice-Président des États-Unis. Sa position est extraordinairement insignifiante et très incertaine. En apparence et strictement parlant, il ne fait point partie de la législature, — il n’en est évidemment pas membre, — et cependant ce n’est pas non plus un fonctionnaire de l’exécutif... C’est simplement un fonctionnaire judiciaire chargé de régler les actes d’une assemblée dont les règlemens ont été faits sans son avis et ne sont point changés d’après son avis.


Et il conclut :


Ce qu’il y a de plus embarrassant dans l’examen de ses fonctions, c’est qu’en montrant qu’il y a peu de chose à dire sur son compte, on a évidemment dit tout ce qu’il y a à dire (p. 259, 260).


Dans cet examen critique des pouvoirs publics aux États-Unis comme ils sont aujourd’hui, ce que l’auteur a surtout devant les yeux, c’est la constitution de l’Angleterre, non pas dans sa totalité : la constitution de l’Angleterre, défalcation faite de la royauté et des lords ! Son idéal, c’est la Chambre des communes avec un ministère formé selon l’esprit qui y domine. La Chambre des communes, c’est le Congrès comme il le veut, et le ministère, un vrai comité de gouvernement ; les deux réunis réalisent pour lui le gouvernement congressionnel. Le Gouvernement congressionnel, c’est le titre de son ouvrage et l’objet de ses vœux. Mais ce Gouvernement congressionnel, c’est dans nos souvenirs le Gouvernement conventionnel : en Amérique, la Convention tempérée, il est vrai, par le fédéralisme ; chez nous, la Convention avec son Comité de salut public ; nous ne sommes pas tentés d’y revenir. Quant au présent, ni le pouvoir législatif en France, partagé, à titre égal, entre deux Chambres issues, quoique par deux modes différens, d’un même suffrage, ni le pouvoir exécutif, qui a toutes les prérogatives d’une monarchie constitutionnelle, n’ont rien à envier au système américain, — à une condition pourtant, c’est que les deux Chambres sachent se maintenir dans les limites respectives de leurs droits, et le Président de la République, user du sien. Quoi qu’il en soit des projets de décentralisation que l’on agite aujourd’hui, il est certain qu’on n’ira pas en France jusqu’à reconstituer nos anciennes