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D’autre part, si l’on n’a en vue que les acquisitions scientifiques, il est exact de dire que la géographie, la météorologie, la physique retireront un ample profit de cette expédition.

Sans doute, MM. de Gerlache et Lecointe n’ont pas approché du pôle Sud autant que J. Ross, qui est remonté jusqu’au-delà du 78e parallèle. Au surplus, ce n’est point là ce qu’ils avaient en vue. À la façon de Ross, ils n’ont pas découvert de grandes terres comme la Terre Victoria, ou des volcans antarctiques comme l’Erebus et la Terror, vomissant leurs flammes dans un cercle de glaces. Ils ont fait quelque chose d’aussi méritoire. Ils ont, les premiers, passé une saison d’hibernage en deçà du cercle polaire, sur la banquise, dont ils ont étudié le régime. Ils ont découvert un passage nouveau de l’Atlantique au Pacifique, le détroit de la Belgica, dont ils ont relevé avec soin les points principaux.

D’autres résultats géographiques méritent encore d’être mentionnés. Les sondages exécutés sous la direction de MM. Lecointe, Arctowski et Dobrowolski, ont fait reconnaître, dans la région de dérive de la Belgica, un vaste plateau continental, d’une profondeur moyenne de 500 mètres. Cette plate-forme, vers le Nord, plonge brusquement à 1 500 mètres ; elle se relève vers le Sud et elle se relie à la Terre Alexandre et à la Terre de Graham vers l’Est. Le dépôt qui la recouvre est formé de sable, de gravier et de cailloux arrondis qui décèlent un cordon littoral. Ce sont là autant d’argumens nouveaux en faveur de l’existence du continent polaire, et confirmatifs par conséquent de la théorie du tétraèdre terrestre de M. Lowthian Green.


IV

Le continent antarctique ne saurait être, en aucune saison, une terre nue : sa surface est certainement recouverte, en tout temps, d’une carapace de glace complète. Au plus fort de l’été, le vent qui soufflait du Sud faisait baisser la température, autour de la station d’hibernage de la Belgica, de plusieurs degrés au dessous de zéro, signe certain qu’il n’avait balayé, en amont, aucune terre dénudée.

D’ailleurs, le froid paraît être beaucoup plus vif autour du pôle Sud qu’autour du pôle Nord. À latitude égale, la température est notablement plus basse du côté antarctique que du côté arctique. Les explorateurs de la Belgica ont supporté des froids de