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en résidence fixe qu’il était question de ressusciter il y a quelques mois ; en fournissant un débouché convenable aux officiers fatigués du cadre actif, il eût pu devenir un remède efficace contre leur stagnation dans les grades subalternes, contre l’exclusion de tous les élémens jeunes du commandement. Le cadre qui navigue et qui combat n’en eût acquis que plus de vigueur.


Après tout, le ministre de la Guerre, poussé par l’opinion publique et par notre tempérament continental, n’a fait qu’accepter ce que les circonstances sont venues lui offrir. En englobant dans son immense étreinte l’armée coloniale et jusqu’aux arsenaux maritimes, en réduisant ainsi la Marine à l’état de mineure incapable de se défendre par elle-même sur son propre terrain, le ministre de la Guerre est resté dans son rôle de soldat. Comme il l’a dit lui-même : « J’ai ouvert les bras à l’armée coloniale, mais j’ajoute que je n’avais pas auparavant joint les mains. »

Le ministre de la Marine s’est désintéressé de la question, sans même songer à prendre l’avis des grands Conseils qui l’entourent. Alors que l’Angleterre, dans l’état actuel de sa flotte, semble avoir à peu près atteint la limite de ses forces comme personnel, nous possédons une réserve de 30 000 inscrits. En attendant qu’il plaise au Gouvernement de mettre notre flotte sur le pied où elle devrait être, cette réserve pouvait être utilisée, avec les réservistes de l’armée de mer appartenant aux zones du littoral, pour créer, sous l’égide de leurs officiers, un corps sédentaire affecté à la défense des côtes réduite à ce qu’elle doit être en raison des voies ferrées. Mais le ministre intéressé n’en a cure ; il assiste impassible au démantèlement de son ministère, il laisse ouvrir la porte à la confiscation prochaine par la Guerre de cette précieuse réserve. Les inscrits maritimes et les réservistes de l’armée de mer non utilisés par la flotte en cas de mobilisation[1] verront bientôt remplacer leur col bleu par le pantalon rouge, et ainsi disparaîtra la dernière supériorité sur nos voisins que le génie de Colbert nous avait ménagée depuis deux siècles.

Notre ministre était sans doute absorbé par la préparation de projets importans qui conviennent mieux à son caractère. Nous nous proposons d’y revenir.


CONTRE-AMIRAL DE PENFENTENYO.

  1. Art. 17 de la nouvelle loi.