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Chine, Siam, Birmanie. Mais la mesure concerne aussi bien la Cochinchine, le Tonkin, l’Annam et le Cambodge, c’est-à-dire tous les débouchés vers la mer qui sont encore le territoire français. Et tandis que les Anglais multiplient les ports francs et ouvrent toutes les portes au commerce, nous introduisons en Indo-Chine des octrois qui sont nos murailles de Chine. C’est entraver de gaîté de cœur l’essor commercial qu’allait prendre le Laos. Les habitans de la rive siamoise, que nous avions réussi à faire revenir sur la rive gauche française, repasseront sur la rive droite pour s’affranchir de ces mesures aussi onéreuses que vexatoires, car, indépendamment de ces charges nouvelles, le Laotien paie en territoire français un impôt de capitation de deux à trois piastres. Lorsqu’il voyage, il doit payer son permis de circulation pour lui, son personnel, ses coolies, sa marchandise. Il paie même un permis de chasse !

Or il est devenu nécessaire que chacun pourvoie à sa sécurité personnelle, dans ces immenses territoires que commencent à envahir des bandes de pillards et de malfaiteurs pourchassés de la rive siamoise, qui se trouvent plus à l’aise pour opérer sur la rive française. Déjà en 1897, pendant ma traversée du pays, on parlait de quelques attentats dans le moyen Laos. Voici aujourd’hui que des convois de pirogues circulant entre les biefs navigables sont attaqués et pillés par des bandes parfaitement organisées, dirigées, m’assure-t-on, par des Chinois habitant la rive gauche, et encouragées par l’inertie de ceux qui ont pour mission de faire respecter l’ordre et de protéger les colons et leurs biens. Il faut se hâter de revenir sur toutes ces malencontreuses mesures et d’assurer la sécurité de l’indigène, ou bien il faut renoncer à tirer du Laos le parti que ses incontestables richesses nous permettent d’espérer.


Le royaume de Luang-Prabang n’est qu’une partie du haut Laos, mais ce n’en est pas la moins intéressante.

Lorsque M. Vacle est arrivé, en 1894, il n’a trouvé aucune organisation administrative. Il fallait, tout en respectant le plus possible les coutumes des habitans, et sans froisser les susceptibilités du roi, des mandarins et des bonzes, prendre les mesures utiles aux intérêts du pays et du peuple. Après trois années d’occupation, quatre réformes capitales étaient déjà accomplies sans secousse, sans froissement.